Ils l'appelaient "grille d'égout", dégoût sûrement, il lui manquait tellement de dents, celles qui lui restaient étaient noires. J'ai le souvenir qu'il n'était pas très grand, pas très propre non plus, le regard chafouin. "Ils" c'étaient les locataires du foyer des jeunes travailleurs, ceux natifs d'Annemasse, qui trainaient les bars, un peu loulous, faisant partie de la faune du coin.
Nous nous retrouvions tous, le matin, dans la grande salle du réfectoire, où nous prenions notre petit déjeuner. Il y avait là ceux qui venaient d'autres régions, atterris là en raison de la pénurie de logement dont nous faisions partie, et puis les autochtones, petits salaires, qui y vivaient depuis des mois, attendant des jours meilleurs.
Lorsque je suis revenue de ma folle nuit, après avoir raconté cette histoire qui s'était répandue comme une trainée de poudre, tous, absolument tous m'avaient soutenue, effarés, effondrés, cherchant les mots, prêts à en découdre.
Très vite nous avions pu mettre un nom sur mon agresseur, et lorsque cela avait été su, ils s'étaient exclamés "QUOI ?!? Grille d'égout ?? "ce si petit minable qui semblait raser les murs depuis toujours.
Leur rage ne pouvait plus l'atteindre, il était pour des années protégé par les murs des différentes prisons qui l'accueilleraient.
Du procès je ne garde que peu de souvenirs, ma chemise blanche bien repassée, mon avocat distant et froid mais qui m'a défendue bec et ongles, très lointainement les excuses de celui qui n'imaginait pas qu'il pourrait un jour être stoppé dans sa folle équipée qui avait détruit nombre de jeunes femmes.
Les années ont passé, et je n'ai plus peur du noir, je ne tremble plus lorsque quelqu'un court derrière moi, je ne me sens jamais coupable, jamais. Mais moi, j'ai pu dire ce que j'avais vécu, on m'a écoutée, on a condamné lourdement celui qui avait tenté de détruire ce que j'étais.
J'ai eu cette chance, être violée par un inconnu, ni glorieux, ni adulé, personne ne l'a soutenu contre moi, personne ne m'a accusée de vouloir détruire un génie, personne n'a séparé l'homme en deux, le bon surpassant le mauvais.
Je vomis tous ces bien-pensants qui crachent sur Adèle Haenel !
Nous nous retrouvions tous, le matin, dans la grande salle du réfectoire, où nous prenions notre petit déjeuner. Il y avait là ceux qui venaient d'autres régions, atterris là en raison de la pénurie de logement dont nous faisions partie, et puis les autochtones, petits salaires, qui y vivaient depuis des mois, attendant des jours meilleurs.
Lorsque je suis revenue de ma folle nuit, après avoir raconté cette histoire qui s'était répandue comme une trainée de poudre, tous, absolument tous m'avaient soutenue, effarés, effondrés, cherchant les mots, prêts à en découdre.
Très vite nous avions pu mettre un nom sur mon agresseur, et lorsque cela avait été su, ils s'étaient exclamés "QUOI ?!? Grille d'égout ?? "ce si petit minable qui semblait raser les murs depuis toujours.
Leur rage ne pouvait plus l'atteindre, il était pour des années protégé par les murs des différentes prisons qui l'accueilleraient.
Du procès je ne garde que peu de souvenirs, ma chemise blanche bien repassée, mon avocat distant et froid mais qui m'a défendue bec et ongles, très lointainement les excuses de celui qui n'imaginait pas qu'il pourrait un jour être stoppé dans sa folle équipée qui avait détruit nombre de jeunes femmes.
Les années ont passé, et je n'ai plus peur du noir, je ne tremble plus lorsque quelqu'un court derrière moi, je ne me sens jamais coupable, jamais. Mais moi, j'ai pu dire ce que j'avais vécu, on m'a écoutée, on a condamné lourdement celui qui avait tenté de détruire ce que j'étais.
J'ai eu cette chance, être violée par un inconnu, ni glorieux, ni adulé, personne ne l'a soutenu contre moi, personne ne m'a accusée de vouloir détruire un génie, personne n'a séparé l'homme en deux, le bon surpassant le mauvais.
Je vomis tous ces bien-pensants qui crachent sur Adèle Haenel !
10 commentaires:
Et je vomis avec toi!
Merci, vraiment merci, de ce texte. Je le trouve juste, ni trop, ni pas assez.
Je vomis aussi avec toi ... aujourd'hui on met les femmes et leurs droits en avant et demain??? Encore beaucoup de chemin ....
J'ai été harcelée, injuriée et menacée pendant des mois et des mois... Et des bien pensants m'ont dit qu'il ne fallait pas en rester aux mots et voir la fragilité et les difficultés de l'être humain...
Je vomis avec vous...
Merci Valérie, femme de cœur.
Je t’embrasse.
Anita
https://theconversation.com/debat-peut-on-separer-la-femme-de-lartiste-132926
#8mars#journéeinternationaledesfemmes
Anita, femme de coeur c'est trop pour qui me connait 😉
Anonyme, Ahh l'humain, qui arrange tant de choses 🙃
Ginou il suffit de voir comment à fini la marche des femmes à Paris le 7 au soir 😬
Chantal, merci 😊
Anne 😄
J'aimerais pouvoir dire des choses belles et réconfortantes, mais je n'ai pas les bons mots pour parler de ces choses-là. Alors je peux essayer avec le soutien...
La première fois que j'ai entendu parler de la séparation de l'homme et de l'artiste, j'étais ado et c'était par rapport à Céline (Voyage au bout de la nuit), qui était fortement antisémite... Et pour moi, le problème est tout différent dans ce cas-là (aujourd'hui), car cet auteur est mort depuis longtemps... Mais la récente affaire des Césars m'a retournée - je ne pense pas qu'on puisse récompenser quelqu'un comme cela pour son œuvre ! Apprécier son film, à la limite, mais lui décerner un prix... non.
J'ai regardé une vidéo d'Adèle Haenel, ou elle dit qu'elle aurait mieux fait de ne pas avoir parlé. Elle dit aussi qu'elle est maintenant inemployable dans son domaine, alors que lui a pu continuer tranquillement à faire des films, sans être inquiété... Et je trouve ça vraiment terrible !
PS: Merci à la commentatrice anonyme pour l'article sur la séparation de la femme et de l'artiste, c'est extrêmement intéressant.
Cara, de mon côté j'ai parfaitement "digéré" ce viol, par dix ans d'analyse et aussi parce que je pense que je suis particulièrement costaud, ayant eu une enfance très stable, aimée par mes parents, confortée dans ce que j'étais. Je pense aux nombreuses femmes qui n'arrivent pas à surmonter un tel traumatisme, qui plongent dans une vie de peur. Oui l'article de mon ou ma lecteur-trice est très intéressant.
Je reviens et ajoute un lien qui, j'espère, vous intéressera : http://www.isabelle-alonso.com/huit-mars-2/
Bon vendredi suivi d'un bon week-end, sans trop d'inquiétude pour vos aimés et en prenant les précautions que vous jugez utiles pour vous et JP.
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