Jp, les enfants et moi sommes arrivés tout à l'heure en fin d'après midi. Week end organisé par ma mère, nous devons rencontrer un producteur de cinéma en vue d'une future collaboration pour un dessin animé. Il y a là mon père, le fameux N. et sa compagne. Comité restreint, personne d'autre.
A notre arrivé nous avons fait la connaissance de N. et son amie en partageant une tasse de thé comme il est de coutume pour accueillir les arrivants. L'hiver est là, il fait froid et la nuit tombe vite. Dehors les épicéas se balancent et frissonnent dans la pluie glacée.
Très vite JP et N. sympathisent, ils prolongent le thé par un apéritif servi dans le séjour du haut, les enfants sont dans la bibliothèque et se régalent de bandes dessinées, ma mère et moi descendons pour préparer le repas et profiter de ce moment pour bavarder. A la cuisine mon père est déjà au travail. Il fait chauffer le four à pain. Tout à l'heure il est allé chercher du bois dans la forêt qu'il a mis en tas juste à l'entrée. Il entre et sort régulièrement, alimentant brassée par brassée le feu. Il fait bon, l'ambiance est curieuse, je n'y prends pas garde.
Tous en pelant de concert le kilo de carottes, j'écoute ma mère me raconter sa vie trépidante. Mon père sort, entre, ressort... il alimente le feu... nous attaquons les pommes de terre. Mon attention est flottante, j'écoute d'une oreille distraite ma mère me raconter ses vernissages, ses cours de gym, ses concerts, ses diners... Mon père revient les bras chargés de bois, il enfourne le tout dans la gueule de four... entre temps les carottes coupées sont au feu. Les poulets attendent sagement que le four soit assez chaud pour être glissés au milieu des braises.
Mon père sort, la porte claque... ma mère d'une voix glaçante dit "il faut que tu le saches, ton père va très mal, on vient de lui découvrir un très mauvais cancer- je t'interdis de lui en parler" Mon père revient, les bras chargés de branches qui rejoignent la fournaise - "Je crois que ça suffit, on va pouvoir bientôt mettre les bêtes" grand sourire, je suis pétrifiée. Il est là, il est mort ?
Je remue les carottes, ce bourdonnement qui revient, m'isole. Ne rien dire. Combien de temps encore à vivre ? Mettre la table, la conversation a repris, ne rien dire, revêtir son personnage, jouer dans la pièce son rôle au plus juste. Sourire, avaler les larmes, essayer de faire le vide, ne pas penser à demain, à jamais.
Jp est descendu avec N et sa compagne. Nous appelons les enfants - A table, le repas est prêt.
Ne rien dire mais pourquoi ? Au moins à JP non ?
Tous le monde a rejoint sa chambre, je chuchote la nouvelle à JP. Nous sommes effarés. Juste ces mots crachés par ma mère et puis rien.
Mon père à son habitude s'est levé avant tout le monde. Je le retrouve entrain de faire le café, il faut mettre la table, poser les bols, je jette un regard vers la fenêtre où les oiseaux ont entamé depuis longtemps leur ballet autour des tas de graines de tournesol. Ne rien dire. Il est pareil à lui même, invraisemblables ces mots le condamnant. J'ai envie de vomir... je ne repartirais pas sans lui avoir parlé !
Midi passe, ma mère fait faire le tour du terrain aux invités, JP et les enfants sont de la balade. Je suis seule avec mon père, je prends mon courage à deux mains.
Papa, je sais que tu ne veux pas en parler, c'est au dessus de mes forces, je ne t'embêterais pas avec ça, mais dis moi ce qu'il en est. Ce cancer ?
Alors d'un grand rire éclatant il ressuscite ! Mais bien sûr que l'on peut en parler, pourquoi non ?
A notre arrivé nous avons fait la connaissance de N. et son amie en partageant une tasse de thé comme il est de coutume pour accueillir les arrivants. L'hiver est là, il fait froid et la nuit tombe vite. Dehors les épicéas se balancent et frissonnent dans la pluie glacée.
Très vite JP et N. sympathisent, ils prolongent le thé par un apéritif servi dans le séjour du haut, les enfants sont dans la bibliothèque et se régalent de bandes dessinées, ma mère et moi descendons pour préparer le repas et profiter de ce moment pour bavarder. A la cuisine mon père est déjà au travail. Il fait chauffer le four à pain. Tout à l'heure il est allé chercher du bois dans la forêt qu'il a mis en tas juste à l'entrée. Il entre et sort régulièrement, alimentant brassée par brassée le feu. Il fait bon, l'ambiance est curieuse, je n'y prends pas garde.
Tous en pelant de concert le kilo de carottes, j'écoute ma mère me raconter sa vie trépidante. Mon père sort, entre, ressort... il alimente le feu... nous attaquons les pommes de terre. Mon attention est flottante, j'écoute d'une oreille distraite ma mère me raconter ses vernissages, ses cours de gym, ses concerts, ses diners... Mon père revient les bras chargés de bois, il enfourne le tout dans la gueule de four... entre temps les carottes coupées sont au feu. Les poulets attendent sagement que le four soit assez chaud pour être glissés au milieu des braises.
Mon père sort, la porte claque... ma mère d'une voix glaçante dit "il faut que tu le saches, ton père va très mal, on vient de lui découvrir un très mauvais cancer- je t'interdis de lui en parler" Mon père revient, les bras chargés de branches qui rejoignent la fournaise - "Je crois que ça suffit, on va pouvoir bientôt mettre les bêtes" grand sourire, je suis pétrifiée. Il est là, il est mort ?
Je remue les carottes, ce bourdonnement qui revient, m'isole. Ne rien dire. Combien de temps encore à vivre ? Mettre la table, la conversation a repris, ne rien dire, revêtir son personnage, jouer dans la pièce son rôle au plus juste. Sourire, avaler les larmes, essayer de faire le vide, ne pas penser à demain, à jamais.
Jp est descendu avec N et sa compagne. Nous appelons les enfants - A table, le repas est prêt.
Ne rien dire mais pourquoi ? Au moins à JP non ?
Tous le monde a rejoint sa chambre, je chuchote la nouvelle à JP. Nous sommes effarés. Juste ces mots crachés par ma mère et puis rien.
Mon père à son habitude s'est levé avant tout le monde. Je le retrouve entrain de faire le café, il faut mettre la table, poser les bols, je jette un regard vers la fenêtre où les oiseaux ont entamé depuis longtemps leur ballet autour des tas de graines de tournesol. Ne rien dire. Il est pareil à lui même, invraisemblables ces mots le condamnant. J'ai envie de vomir... je ne repartirais pas sans lui avoir parlé !
Midi passe, ma mère fait faire le tour du terrain aux invités, JP et les enfants sont de la balade. Je suis seule avec mon père, je prends mon courage à deux mains.
Papa, je sais que tu ne veux pas en parler, c'est au dessus de mes forces, je ne t'embêterais pas avec ça, mais dis moi ce qu'il en est. Ce cancer ?
Alors d'un grand rire éclatant il ressuscite ! Mais bien sûr que l'on peut en parler, pourquoi non ?
3 commentaires:
Tu m'as angoissée dis-donc.
C'est ton père, pourquoi t'interdire d'en parler avec lui ? Elle est un peu étrange ta maman non ? Parler de tout sauf de l'essentiel ?
Tu as bien fait de te lancer Valérie.
Comment te dire... ma mère est un peu égocentrique ...et c'est un euphémisme ;)
OuF Ambiance pesante! Heureusement que ton père a détendu l'atmosphère.
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