jeudi 11 avril 2013

Passe la vie

Une de mes petites voisines, celle qui longtemps me jetait par dessus le balcon ses revues qui font chanter la vie, est morte dimanche d'une leucémie foudroyante, elle avait quatre vingt douze ans.
Des trois vieilles dames qui vivaient sur le même palier que nous il n'en reste plus qu'une, recluse dans son immense appartement, n'ouvrant qu'à l'assistante qui vient chaque jour lui donner à manger.
Elles étaient toutes nées la même années et au fur et à mesure des années passant se détestaient cordialement.

La première à partir, il y a déjà plusieurs années, d'un cancer du sein non diagnostiqué, avait longtemps tenu un bistrot. Elle a fait jusqu'à la fin de sa vie des ménages pour compléter une retraite si menue qu'elle n'aurait pu survivre sans. Renée était très drôle, d'un caractère de chien, et picolait jusqu'à plus soif. Nous l'aimions sans doute plus que les deux autres.

La seconde, Ernestine, avait très bien vécu grâce à son mari bijoutier en Suisse. Il sculptait à ses heures, elle, faisait le ménage toujours. Et son balcon était le plus propre jamais vu. Elle briquait sa maison, et se faisait des films, toute la journée, puis me les racontait, au soleil, de balcon à balcon. Le monde était suspect c'est sûr !
Lorsqu'elle sortait sur son palier pour descendre la poubelle,  toute tordue depuis qu'un camion l'avait traînée sur deux cent mètres, elle sursautait, poussant un petit cri se terminant en rire chaque fois qu'elle nous croisait. Cela faisait quelques mois qu'elle ne se baladait plus en ville, mais l’Été dernier encore, elle posait sur sa tête son petit canotier, et toute pimpante et brinquebalante,  allait chez son coiffeur se faire belle.

Et puis lentement elle a décliné. Les ambulances se succédaient mais toujours elle revenait chez elle. Chaque jour ses enfants, ses petits enfants, venaient lui rendre visite, elle avait même accepté de laisser une clef de son appartement à sa fille après de longues discussions.
Et puis dimanche, alors que nous étions en Alsace, elle a eu du mal à respirer, une fois de plus les pompiers sont venus, elle ne rentrera plus.

7 commentaires:

Mel a dit…

C'est la vie, c'est triste, et j'aime la façon dont tu racontes ces deux femmes que tu as connues dans la dernière partie de leur parcours.

Calyste a dit…

J'ai moi aussi une vieille voisine que j'adore (et qui me le rend bien!). Je l'appelle "Mémé", elle m'appelle "Kiki", alternant sans s'en rendre compte le vous et le tu. Cet hiver, elle a été très mal et, pour la première fois, j'ai vu baisser son indéracinable dynamisme.
J'ai du mal à accepter qu'il me faudra un jour me passer d'elle.

Anonyme a dit…

C ' est le bon côté (ou mauvais selon .. )de vivre en appartement et d avoir des voisins . Betty

marieno a dit…

Ca serre le coeur...Bel hommage rendu à toutes, j'ose me dire que ces échanges de balcon à balcon l'ont certainement rendue très heureuse.

Valérie de Haute Savoie a dit…

Mel oui j'aimais bien ces deux petites dames.

Calyste, j'ai été bien plus touchée par la mort de Renée que celle d'Ernestine, nous étions Renée et moi très complice et son agonie a duré presque un an. Tu as déjà parlé de ta voisine, je comprends ta future peine.

Betty, des voisins nous en avons de toute façon même dans une maison ;)

Marieno, c'est vrai que ces échanges balconnesques étaient plutôt rigolo, s'autant plus qu'il faisait toujours beau à ces moments là :D

Anonyme a dit…

Sauf si les voisins n occupent pas leurs maisons (2) bon week end . Betty

Valérie de Haute Savoie a dit…

Ah oui dans ce cas... :)