Agence Deslacs bonjour
Bonjour Valérie, c'est Valérie ?
Oui, bonjour Madame... vous êtes Madame ?
Madame Desnou de la copropriété des Ulysses - Ecoutez voilà - je vous appelle parce que là, il y a une dame qui a tendu une ficelle sur son balcon, enfin une corde plutôt, tout du long, ça traverse le balcon.
Oui ?
Tout du long ! et elle suspend ses draps, c'est affreux , affreux. sa voix part rapidement dans les aigus
A quel étage ?
Euh, au sixième je crois, oui au sixième
Et vous êtes a quel étage ?
Au cinquième
... au cinquième ? je visualise... elle sous le balcon ? mais pourquoi ce linge la dérange t-il ?
Mais c'est affreux !
Vous avez vu sur son balcon ? poser la question, juste pour qu'elle prenne un peu conscience de la bêtise de son intolérance.
Ah non pas de chez moi, mais quand je suis avec les enfants dans le jardin en bas, Mais c'est Affreux ! On voit de la rue ce linge pendu qui sèche ! Tous les jours elle suspend son linge, ses draps, sur la corde.
Mhmmm oui... eh bien j'en ai pris note, j'en ferai part au gestionnaire... Vous avez le nom de cette dame.
Elle fait semblant de réfléchir, mais très vite avec une sorte de jouissance, elle dit le nom, un nom aux consonances chantantes évoquant ces pays de l'Est où le linge claque au vent.Je cherche sur le fichier... oui, effectivement je retrouve ce nom, cela fait peu de temps qu'ils ont emménagé... des étrangers forcément.
Ah et puis... comme je vous ai au téléphone, il y a aussi dans le local à vélo, des taches de graisse, noires... un temps... qui sentent le poisson ! Poisson ! elle dit poisson comme les enfants disent "caca" grassement, se délectant de ce mot qu'elle malaxe et qui devient alors un mot sale gorgé de toute la rancœur de son rejet de l'autre.
Sans doute de la graisse pour les chaines à vélo, Madame, peut être que cela a un peu coulé. Elle hésite, elle sent que je n'abonde pas dans son sens...
Tiens mais justement il me semble que c'est à l'endroit des vélos de ces gens, ceux du linge ! >ces étrangers qui font rien qu'à salir - ça y est, elle n'arrive plus à retenir son dégoût, sa voix maintenant est métallique
...
Voix doucereuse... Vous vous rendez compte, il y a dans notre copropriété des vieilles personnes, vous savez, des vieilles personnes qui ont du mal à marcher... J'ai pensé, imaginez si elles glissent sur la graisse, avec leur col du fémur fragile ... Le coup des vieux, grand classique !
... il y a tout de même peu de risque qu'elles viennent se coincer entre les vélos non ? elle hésite, elle attend un mot de soutien qui lui permettrait de rebondir... rien, je résiste... rester courtoise tout de même.
Et puis... j'y pense, vous savez le robinet dans l'entrée, vous voyez lequel ?
Non, excusez moi je ne connais pas cette copropriété.
Ah vous ne connaissez pas ?
Non, mais dites moi tout de même.
Ben au dessus du robinet il y a des taches qui ne partent plus. D'abord on a cru que c'était des gouttes d'eau, mais là c'est de la graisse, de la graisse noire ! Elle est jeune, j'entends des enfants qui l'appellent, elle est jeune et si aigrie déjà.
Oui, autre chose ?
Euh non là pour l'instant je ne vois pas
Eh bien Madame, j'ai pris note de vos remarques, je transmettrai l'information à Monsieur Deslacs. Abréger, ne plus entendre cette voix pleine du dégoût des autres.
Vous allez faire quoi pour le linge ?
Ne vous inquiétez pas, nous allons vraisemblablement faire un courrier. Je m'en occupe ! Au revoir Madame, bonne journée.
Je raccroche, envie de m'ébrouer.
Bonjour Valérie, c'est Valérie ?
Oui, bonjour Madame... vous êtes Madame ?
Madame Desnou de la copropriété des Ulysses - Ecoutez voilà - je vous appelle parce que là, il y a une dame qui a tendu une ficelle sur son balcon, enfin une corde plutôt, tout du long, ça traverse le balcon.
Oui ?
Tout du long ! et elle suspend ses draps, c'est affreux , affreux. sa voix part rapidement dans les aigus
A quel étage ?
Euh, au sixième je crois, oui au sixième
Et vous êtes a quel étage ?
Au cinquième
... au cinquième ? je visualise... elle sous le balcon ? mais pourquoi ce linge la dérange t-il ?
Mais c'est affreux !
Vous avez vu sur son balcon ? poser la question, juste pour qu'elle prenne un peu conscience de la bêtise de son intolérance.
Ah non pas de chez moi, mais quand je suis avec les enfants dans le jardin en bas, Mais c'est Affreux ! On voit de la rue ce linge pendu qui sèche ! Tous les jours elle suspend son linge, ses draps, sur la corde.
Mhmmm oui... eh bien j'en ai pris note, j'en ferai part au gestionnaire... Vous avez le nom de cette dame.
Elle fait semblant de réfléchir, mais très vite avec une sorte de jouissance, elle dit le nom, un nom aux consonances chantantes évoquant ces pays de l'Est où le linge claque au vent.Je cherche sur le fichier... oui, effectivement je retrouve ce nom, cela fait peu de temps qu'ils ont emménagé... des étrangers forcément.
Ah et puis... comme je vous ai au téléphone, il y a aussi dans le local à vélo, des taches de graisse, noires... un temps... qui sentent le poisson ! Poisson ! elle dit poisson comme les enfants disent "caca" grassement, se délectant de ce mot qu'elle malaxe et qui devient alors un mot sale gorgé de toute la rancœur de son rejet de l'autre.
Sans doute de la graisse pour les chaines à vélo, Madame, peut être que cela a un peu coulé. Elle hésite, elle sent que je n'abonde pas dans son sens...
Tiens mais justement il me semble que c'est à l'endroit des vélos de ces gens, ceux du linge ! >ces étrangers qui font rien qu'à salir - ça y est, elle n'arrive plus à retenir son dégoût, sa voix maintenant est métallique
...
Voix doucereuse... Vous vous rendez compte, il y a dans notre copropriété des vieilles personnes, vous savez, des vieilles personnes qui ont du mal à marcher... J'ai pensé, imaginez si elles glissent sur la graisse, avec leur col du fémur fragile ... Le coup des vieux, grand classique !
... il y a tout de même peu de risque qu'elles viennent se coincer entre les vélos non ? elle hésite, elle attend un mot de soutien qui lui permettrait de rebondir... rien, je résiste... rester courtoise tout de même.
Et puis... j'y pense, vous savez le robinet dans l'entrée, vous voyez lequel ?
Non, excusez moi je ne connais pas cette copropriété.
Ah vous ne connaissez pas ?
Non, mais dites moi tout de même.
Ben au dessus du robinet il y a des taches qui ne partent plus. D'abord on a cru que c'était des gouttes d'eau, mais là c'est de la graisse, de la graisse noire ! Elle est jeune, j'entends des enfants qui l'appellent, elle est jeune et si aigrie déjà.
Oui, autre chose ?
Euh non là pour l'instant je ne vois pas
Eh bien Madame, j'ai pris note de vos remarques, je transmettrai l'information à Monsieur Deslacs. Abréger, ne plus entendre cette voix pleine du dégoût des autres.
Vous allez faire quoi pour le linge ?
Ne vous inquiétez pas, nous allons vraisemblablement faire un courrier. Je m'en occupe ! Au revoir Madame, bonne journée.
Je raccroche, envie de m'ébrouer.
23 commentaires:
faire régner l'ordre, quel pouvoir ! Probablement une candidate supplémentaire pour les prochaines élections présidentielles...
On se croirait en Suisse...
Ah, au fait, puisque je t'ai au téléphone... euh, au blog, je voulais te dire, le chien de mon voisin d'en dessous fait un bruit d'enfer sur leur balcon tous les soirs, tu pourrais pas leur envoyer un courrier à eux aussi? ;)
On en est pas très loin Dr CaSo, mais ce qui m'étonne chaque jour dans ce poste, c'est ce constant besoin de dénoncer l'autre. A croire qu'une partie de nos propriétaires passe sa journée à chercher ce qu'ils pourraient bien dénoncer. Certains m'appellent tous les jours.
Oui Saperli, c'est le côté un peu triste de ce boulot.
Dr CaSo je fais une lettre tout de suite :)
Les délices de la copropriété !!! j'appelle ça les éternels râleurs (pour ne pas dire plus vulgaire) pour qui rien ne va, rien n'est bon (sauf eux bien sur)... je connais j'ai presque les mêmes à la maison, enfin dans l'immeuble !!!
Je suis certain que ce n'est rien comparé aux lettres de délation qui sont envoyées chaque jour dans les différents services du gouvernement
Je n'aurais sincèrement jamais imaginé que ce genre d'appels puissent être. Des petits griefs, mais pas à ce point. Merci Valérie d'ouvrir mes horizons trop pleins d'espoir en la bonté de ce monde :)
Moi; j'ai des enfants au deuxième étages de ma maison, qui sont d'une indiscrétion incroyable, D'autre part mon mari se couche à des heures impossible et me réveille et mon chien aboie dès qu'il y a un oiseau dans le jardin.
c'est absolument invivable, d'autant plus que que mon fils entre dans la maison avec son scooter fauteuil roulant et me salit toute la maison sans parler des dégradations des murs ...
tu veux pas appeler la police Valérie ?
Ah ne savais pas que les gens se permettaient de téléphoner ainsi au gestionnaire, pour se libérer de leur méchanceté... J'aurais dû m'en douter...
J'espère que tu n'as pas que des appels de ce genre, sinon tu vas désespérer de la nature humaine...
Pour pas trop déprimer en entandant trop de ce genre de complaintes, souviens-toi que tu peux leur répondre de plusieurs manières différentes et qu'au moins, tu ne les encourages pas dans cette direction (contrairement à ce que d'autres pourraient faire). Je sais, tu ne peux pas leur dire "mais madame, vous vous rendez compte que ce que vous dites est complètement débile!?" mais tu peux quand'même le leur faire comprendre, avec toute la délicatesse dont tu sais fais preuve :)
Dr. CaSo> Hu hu, ça fait du bien déjà rien qu'à imaginer Valérie lui répondre ça :)
laisse moi deviner tu travailles à Genève ? ;-)
mon mari et moi y avons passé quelques semaines, et j'ai été surprise de constate à quel point la délation voisinesque a été élevée au rang de hobbie,voire de passion.
Sur la quantité de propriétaires, beaucoup restent très humains, normaux, n'appelant que pour des sinistres, ou des pannes diverses, et puis j'en ai certains qui appellent pour râler, parce qu'ils sont propriétaires et de ce fait ont des droits, le droit que tout aille droit :D
Dr CaSo, j'ai un malin plaisir à leur ouvrir les yeux sur la futilité de leur exaspération. Je m'amuse beaucoup en réalité, c'est pour moi tous les jours une petite pièce de théâtre.
Non non je ne bosse pas en Suisse, mais tout près il est vrai.
Ça me rappelle l'histoire de cette dame qui avait porté plainte contre ses voisins qui se promenaient à loilpé chez eux.
Elle a été déboutée, parce que l'enquête a démontré que pour voir l'appartement des voisins, il fallait qu'elle monte sur son WC et se torde le coup jusqu'à l'extrême limite physiologique.
Anita, c'est EXACTEMENT ça !
Je te trouve d'une patience extrême et je te souhaites de continuer à éteindre gentiment leur ardeur à médire!!!!
Non mais!
Il y a 3 ans, pour moi ce genre de cirque tenait du cinéma. Français... les films...
Maintenant je vis de l'intérieur ce genre de "passe-temps" tout à fait détestable. Et un peu comme toi, par mon attitude: je me plais à les débouter gentiment. ;)
J'ai justement la scéance annuelle des propriétaires ce jeudi... pour la première fois: j'ai juste envie de me désister.
Ouh là là uen AG ! C'est encore un peu un cauchemar à préparer pour moi. Ne pas oublier d'envoyer à temps les recommandés et tout ce que cela implique comme paperasse avant pendant et après :)
Je te comprends pour en avoir préparées, animées et résumées durant plusieurs années au Québec.
N'empêche que c'était pas mal plus simple qu'ici...
J'aime beaucoup la façon dont tu as écrit ce billet, que j'avais inexplicablement raté jusqu'à maintenant : le ton, les temps, les deux (les trois) voix, la précision. Pas du tout facile, cette facilité apparente.
À propos de ma scéance annuelle... je suis fort aise de l'avoir loupée, parce qu'en majorité: les tons tranchants, accusateurs et sans respects y avaient droit de citée. Comme d'hab...
Dorénavant je refuse d'être contaminée par ces pratiques totalement régressives, na!
Merci Pablo, même si je ne suis pas sûre d'avoir rendu vraiment le ton de la conversation.
Encore un exemple flagrant de l'incompréhension et de la peur des autres Mr S a bien réussi à l'utiliser :o(
Je suis tout de même stupéfaire de la méchanceté de certains, Il suffit d'ailleurs d'aller aujourd'hui lire le billet d'Eolas (http://www.maitre-eolas.fr/2008/07/31/1043-le-droit-rien-que-le-droit) pour voir jusqu'où peut aller cette méchanceté.
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