C'était un mardi, un mardi de septembre dont le monde entier se souviendrait éternellement mais pour l'instant c'était juste un mardi.
Mon bureau était au rez de chaussée, dans une hlm en périphérie de la ville, j'étais seule, c'était le début de l'année scolaire, les groupes n'avaient pas encore démarré.
Aucun bruit dans l'immeuble, le soleil avait fait le tour et ne baignait plus la petite pelouse où, le soir, les chiens venaient accompagnés de leurs maitres, faire leurs énormes crottes juste sous ma fenêtre. Mon ordinateur ronronnait sagement, aucune connexion internet, isolée avec pour seul lien un téléphone. Je préparais depuis quelques jours la rentrée de mon premier groupe de jeunes diplômés, fraichement jetés dans la vie active. Bientôt les locaux seraient remplis de vie, mais là j'étais dans un silence serein.
J'avais le matin, fait une petite dizaine de factures qu'il ne restait plus qu'à mettre sous enveloppe après les avoir enregistrées. Mettre à jour la compta et me pencher sur ce futur groupe, renseigner le tableau et tout en remplissant les cases laisser flotter l'imagination. Beaucoup d'ingénieurs comme toujours, mais aussi quelques profils plus originaux, ceux qui seront sans doute plus difficile à "caser", mais que je me réjouis déjà de découvrir.
Il fait encore chaud, et de la fenêtre ouverte les oiseaux piaillant, rendent cet après-midi presqu'estival.
Je me souviens de ce silence paisible, le ciel bleu, les arbres frémissants d'un léger vent doux. Au loin les Alpes, le temps suspendu.
Le téléphone avait sonné, mon amie Yoyotte au bout du fil. Nous nous appelions tous les jours, pour nous raconter n'importe quoi, nos vies, nos enfants, nos boulots ; elle journaliste, moi secrétaire, nous deux extraordinairement complices.
D'une voix fébrile elle me dit l'avion qui vient d'embrocher une tour, les autres avions, fous, qui volent vers on ne sait où, le monde qui s'écroule. Elle dit tout cela et je l'écoute, incrédule, le regard posé sur un moineau sagement assis sur une branche. Aucun bruit, c'est l'heure de la sieste. Ainsi le monde s'écroulerait alors qu'ici rien ne bouge ? Un autre avion suit le premier, elle me parle de chaos et j'entends derrière elle l'affolement dans le studio, je suis là, dans le silence et lentement l'angoisse commence à m'étreindre. Pas un bruit, il semble que la vie s'est arrêtée.
Là bas l'enfer se déchaîne, elle doit me laisser, en raccrochant je me sens si seule.
J'appelle à la maison, G. décroche tout excité, il est devant la télévision, seul, et regarde ces images qui tournent en boucle encore et encore. Il me raconte ce que je n'arrive pas encore à croire, je pense à l'angoisse qui m'avait saisie deux jours avant lorsque Massoud avait été assassiné. Je ne sais pas ce qu'il voit, ce qu'il comprend et j'aimerais tellement être avec lui, accompagner de mots cette violence que je devine. Encore une bonne heure avant que je ne rentre, mais C. vient juste de finir ses cours, elle rejoint son frère devant le poste, nous échangeons quelques phrases et je raccroche, retrouvant le silence irréel de mon bureau.
Je crois que ce qui me restera de ce jour, c'est cette paix émanant des immeubles alors que là bas mourraient dans une fureur folle des centaines d'hommes et de femmes.
Mon bureau était au rez de chaussée, dans une hlm en périphérie de la ville, j'étais seule, c'était le début de l'année scolaire, les groupes n'avaient pas encore démarré.
Aucun bruit dans l'immeuble, le soleil avait fait le tour et ne baignait plus la petite pelouse où, le soir, les chiens venaient accompagnés de leurs maitres, faire leurs énormes crottes juste sous ma fenêtre. Mon ordinateur ronronnait sagement, aucune connexion internet, isolée avec pour seul lien un téléphone. Je préparais depuis quelques jours la rentrée de mon premier groupe de jeunes diplômés, fraichement jetés dans la vie active. Bientôt les locaux seraient remplis de vie, mais là j'étais dans un silence serein.
J'avais le matin, fait une petite dizaine de factures qu'il ne restait plus qu'à mettre sous enveloppe après les avoir enregistrées. Mettre à jour la compta et me pencher sur ce futur groupe, renseigner le tableau et tout en remplissant les cases laisser flotter l'imagination. Beaucoup d'ingénieurs comme toujours, mais aussi quelques profils plus originaux, ceux qui seront sans doute plus difficile à "caser", mais que je me réjouis déjà de découvrir.
Il fait encore chaud, et de la fenêtre ouverte les oiseaux piaillant, rendent cet après-midi presqu'estival.
Je me souviens de ce silence paisible, le ciel bleu, les arbres frémissants d'un léger vent doux. Au loin les Alpes, le temps suspendu.
Le téléphone avait sonné, mon amie Yoyotte au bout du fil. Nous nous appelions tous les jours, pour nous raconter n'importe quoi, nos vies, nos enfants, nos boulots ; elle journaliste, moi secrétaire, nous deux extraordinairement complices.
D'une voix fébrile elle me dit l'avion qui vient d'embrocher une tour, les autres avions, fous, qui volent vers on ne sait où, le monde qui s'écroule. Elle dit tout cela et je l'écoute, incrédule, le regard posé sur un moineau sagement assis sur une branche. Aucun bruit, c'est l'heure de la sieste. Ainsi le monde s'écroulerait alors qu'ici rien ne bouge ? Un autre avion suit le premier, elle me parle de chaos et j'entends derrière elle l'affolement dans le studio, je suis là, dans le silence et lentement l'angoisse commence à m'étreindre. Pas un bruit, il semble que la vie s'est arrêtée.
Là bas l'enfer se déchaîne, elle doit me laisser, en raccrochant je me sens si seule.
J'appelle à la maison, G. décroche tout excité, il est devant la télévision, seul, et regarde ces images qui tournent en boucle encore et encore. Il me raconte ce que je n'arrive pas encore à croire, je pense à l'angoisse qui m'avait saisie deux jours avant lorsque Massoud avait été assassiné. Je ne sais pas ce qu'il voit, ce qu'il comprend et j'aimerais tellement être avec lui, accompagner de mots cette violence que je devine. Encore une bonne heure avant que je ne rentre, mais C. vient juste de finir ses cours, elle rejoint son frère devant le poste, nous échangeons quelques phrases et je raccroche, retrouvant le silence irréel de mon bureau.
Je crois que ce qui me restera de ce jour, c'est cette paix émanant des immeubles alors que là bas mourraient dans une fureur folle des centaines d'hommes et de femmes.
1 commentaire:
C'est fou comme personne n'oubliera ce jour :(
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