mercredi 18 décembre 2013

Récurrence

Il ou elle arrive un matin, sans prévenir, plus exactement sans que nous ayons été prévenus. Gauche, planté-e sur ses deux jambes bien raides, la tête un peu basse, les yeux gonflés de sommeil, légèrement en retrait du chef qu'il ou elle considère avec crainte. Son sourire souvent agrémenté de bagues dentaires, il ou elle nous scrute discrètement, c'est LE, LA stagiaire que l'on va se coltiner une, voir deux semaines. Celui ou celle à qui il faudra trouver un truc à faire, intéressant si possible, amusant pourquoi pas, un truc qui lui fera passer sa semaine avec plaisir et qui lui laissera un bon souvenir à raconter à ses copains qui eux se seront fait iéch à mort.

Cette fois-ci nous avions il ET elle. Deux d'un coup et un boulot de fou sans temps morts.

Alors nous avons déployé des trésors d'imagination pour leur donner des petites choses à faire, chaque jour différentes, leur montrer l'éventail de notre travail. 

Lui, rigolo et plein d'énergie, s'épanouissait de jour en jour. Elle, un peu molle, arrivait dix minutes en retard matin et après midi, trainant son pas nonchalant, le regard déjà blasé d'une vie commençante. 
Lui, s'inondait de parfum chargé en testostérone, mais ignorait l'usage du savon. Elle, s'affalait sur une chaise, et soupirait à la moindre demande. 

Nous les avons trimballés en visite, état des lieux, fait faire des bons de commande, distribué le courrier, recopier des constats au propre, fait raconté un peu leur vie, leurs envies. 

Lui veut être commercial, elle, mannequin, policier ou hôtesse de l'air. Lui a trouvé très vite un charme fou à ce boulot, ou plutôt à la toute jeune fille de l'accueil, elle pfffff elle a trouvé ça longgggg, mais longgggg.

Et puis ils sont repartis et sans doute ne les reverrons nous plus. Sur son rapport de stage elle notera que l'outil emblématique d'une agence immobilière est le coupe-papier (parce que ça évite de prendre les mains pour ouvrir les enveloppes) et que son occupation principale aura été de regarder le plafond, "parce que si elle a fait ce stage c'est parce qu'on l'a obligée". Lui ne pourra pas dire combien il a apprécié la petite jeune de l'accueil, mais il repart avec une idée sans doute plus précise de ce qu'est une agence, et combien l'on peut s'amuser même si le boulot est parfois vraiment ingrat.

Nous avons éteint la bougie désodorisante, et attendons les prochains qui ne sauront tarder.

13 commentaires:

Nadya a dit…

Ton billet me fait sourire ! Dans mon job les stagiaires (souvent des femmes) ont une place à part entière. Un référent aux RH leur ait destiné, un protocole et livret d'accueil est établi en équipe pour eux et nous leur demandons la liste de leurs objectifs à l'arrivée avec bilan mi stage et tout le tralala...
Nous venons tous de formations en alternance donc le stagiaire a une place importante dans la vie de la crèche et sont même gratifiés aujourd'hui.
C'est surement parce que le "mienne" va bientôt s'en aller, après un an de collaboration que je fais un commentaire si long....

Anne a dit…

Dans mon école, comme chez Nadya, les stagiaires font quasi partie de l'organigramme!!! Et généralement nous sommes plutôt tombés sur le modèle motivé...

Sacrip'Anne a dit…

Mais seraient-ce les terrifiants stagiaires de 3e ?!!

Dr. CaSo a dit…

Ca me rappelle mon stage dans une usine de fabrication de biscuits! J'avais 16 ou 17 ans, et ça m'a drôlement motivée pour continuer mes études :)

Calyste a dit…

Ah! les stages ! En troisième, j'en faisais soutenir cinq ou six à l'oral ! Et ça n'a jamais été triste. Affligeant parfois mais pas triste. Et quelquefois enthousiasmant !

Valérie de Haute Savoie a dit…

Nadya, ah mais là ce ne sont pas des stagiaires qui s'intéressent au métier, ce sont des troisièmes, à qui on a demandé de trouver une entreprise qui accepterait de les "garder" une semaine, pour qu'ils découvrent le monde du travail. S'ils ont de la chance ils ont un papa ou une maman qui bossent à Canal plus, s'ils en ont moins ils débarquent un peu là où on a encore une petite place. Et la plupart végètent une semaine, dorment, parfois s'intéressent un instant à ce qui se fait autour d'eux. Ils sont gentils, rarement impolis, ils sont tout tout jeunes.

Anne, oui mais ce ne sont pas les fameux 3ème :)

Sacrip'Anne, oui OUALA !

Dr CaSo, je crois que c'est l'intérêt principal, leur faire comprendre qu'apprendre peut les emmener plus loin que certains petits boulots et surtout tant qu'ils sont à l'école ils sont encore un peu tranquille :D

Calyste, je t'avoue que lorsque nous avons vu le rapport de stage de la gamine, nous lui avons fortement conseillé de revoir sa copie et en avons discuté un long moment avec elle, afin qu'elle ne déboule par devant son prof avec un truc certes hilarant, mais franchement pas notable :D

Nanou a dit…

Ha ces stagiaires....

et la stagiaire qui t'assure et te soutient que la dénomination d'un des niveaux de la hiérarchie analytique de nos produits n'est pas bonne, que dans son école de commerce on lui donnait un autre nom.. qu'il faudrait le changer sur le progiciel maison.... que bien sûr lui-ai-je répondu mais que si j'avais l'aval du grand big boss à qui elle ferait la proposition et je lui ai donné le numéro de poste du big chef... Là elle n'a pas osé...

et le stagiaire en marketing qui t'affirme que le logiciel ne fonctionne pas et te prend de haut, qu'il est le seul à s'en plaindre et que de guerre lasse je vais voir ce qui se passe sur son pc. En essayant de cliquer avec sa souris (à l'époque avec mécanisme à boule et pas encore à infrarouge comme maintenant), je compris vite d'où venait le pb et lui fit la remarque suivante : c'est juste que ces petites bébêtes ont aussi besoin d'une toilette de temps en temps et je fit en live un cours de toilettage de Mulot... Il put cliquer sans pb et ses collègues pouffaient de rire derrière leur écran... et furent heureux de ce mouchage...

Je fus aussi bluffée par l'autonomie, la rapidité d'adaptation d'autres stagiaires que nous avons eu dans notre service informatique et quel grand plaisir de travailler avec ces jeunes que l'on souhaiterait avoir comme futurs collègues....

laurence a dit…

et les profs tuteurs de stagiaires, on en parle ? ;-) entre les stagiaires que l'on prend parce que "vraiment je ne sais pas ce que je vais pouvoir en faire" ou "si si il est très bien en vente vous verrez" mais oui bien sûr ! mais bon, on n'oublie pas qu'on en a eu besoin et que nos enfants en ont besoin des stages, hein ! (d'ailleurs fils aîné tout juste diplômé est bien content de faire son stage ingénieur pour Vinci au Maroc qui va déboucher sur un contrat d'un an normalement hein !) ps : tu m'as trop fait sourire avec la bougie désodorisante :))

Valérie de Haute Savoie a dit…

Nanou et Laurence, vous parlez de stagiaires qui font des stages dans l'intention de s'en servir et non pas nos fameux stagiaires de 3ème qui sont là une semaine, forcés par le collège, de tremper dans "LEMONDEDUTRAVAIL" et qui en réalité, bien souvent, sont dans une entreprise n'ayant rien à voir avec leur rêves encore tout doux, d'un emploi magnifique et rémunérateur sans trop de contraintes.
Je les aime bien ces petits stagiaires, je les fais parler, j'aime les entendre raconter leur rêve, et surtout ils me font très souvent rire avec leur mots si contemporains.
Des stagiaires longue durée, nous avons aussi, mais cela n'a rien à voir, ils s'impliquent et sont plus âgés.

Mel a dit…

D'expérience, est-ce que ce stage de 3ème a un intérêt à ton avis ? Est-ce qu'il n'arrive pas trop tôt ?

Frensoiz a dit…

La seule stagiaire dont je garde un souvenir est la fille d'un collègue, potelée, souriante et pleine d'énergie, qui savait déjà à 17 ans ce qu'elle voulait faire (journaliste) mais qui avait trié et classé (tâche emmerdante au possible) mes dossiers avec sourire et efficacité. Elle bosse aujourd'hui à NY pour une publication franco-américaine et elle s'éclate. Pour tout dire, aujourd'hui, je l'envie un peu parce que moi, je n'ai pas bougé ...

Valérie de Haute Savoie a dit…

Frensoiz, c'est aussi pour cela que je les aime bien ces petits stagiaires, parce qu'ils sont encore plein d'espoir. J'aime les écouter me raconter leurs envies, leurs rêves. Ils ont la chance d'être nés dans un monde où voyager est devenu naturel et du coup leurs rêves ont cette dimension. Ils vont ailleurs, s'ouvre au monde.

Valérie de Haute Savoie a dit…

Mel oui cela a de toute façon une importance, petite ou grande là n'est pas la question, mais cela leur fait découvrir autre chose que l'école et la maison. La télévision aussi évidemment leur montre l'ailleurs, mais y être, voir le travail, sentir les tensions, discuter avec des personnes qu'ils n'ont jamais vu, tout cela est important, quelque soit l'âge d'ailleurs.