Elle en avait vu tant, de salles d'attente miteuses aux magazines délabrés et si anciens que l'on se demandait si un être vivant exerçait encore dans le cabinet, qu'elle avait décidé que jamais, au grand jamais la nôtre ne serait délaissée.
La première était spacieuse, aux murs blancs ornés de tableaux, moquette rase grise, des chaises achetées comme tous nos meubles d'alors chez des brocanteurs que maman écumait. Au centre une table basse, lourde, en bois épais et les magazines renouvelés chaque semaine. Juste à côté les fameuses toilettes chics dont les murs étaient tapissés d'un gros cannage doré sur fond noir, moquette épaisse d'un noir brillant. Juste à côté du petit lavabo un collages de maman, qui disait que c'était l'endroit idéal pour s'y plonger des heures à rechercher les multiples détails.
Bien avant que papa fasse transpercer le mur donnant sur l'appartement qui viendrait prolonger le nôtre, nous vivions dans la partie droite séparée par une porte vitrée. Il y avait donc d'un côté le bureau, la salle d'attente, le salon chambre à coucher des parents, la grande salle de séjour. De l'autre, nos trois chambres, la cuisine et la salle de bain surélevée, protégées des regards curieux des "malades".
A tour de rôle nous ouvrions la porte aux patients. Nous avions tous été brifés ; "Lorsque vous entendez sonner, mettez vous bien en face de la porte, ouvrez en faisant un sourire et dites "Bonjour Madame (Mademoiselle, Monsieur), donnez vous la peine d'entrer", un pas en arrière tout en tenant la porte, du bras gauche vous ferez un geste gracieux, demi cercle un peu lent, pour les inviter à entrer. "La salle d'attente est par-ici" direz-vous, puis vous les précéderez afin de les conduire toujours souriants, "Le docteur vous recevra dans un instant".
Et voilà, pas plus compliqué que cela. Nous repartions en courant dans nos chambres.
Les malades de papa n'avaient jamais l'air malades, parfois un regard un peu bizarre. Papa était docteur, il avait bien essayé de nous expliquer de quoi, franchement tout ce que l'on avait retenu, c'était qu'il valait mieux ne pas trop en parler à l'extérieur. Tout cela était mystérieux, mais tout de même nous étions très fiers d'avoir un papa si spécial que pleins de gens venaient voir, et qui faisait le soir des conférences. Ce n'était pas un docteur qui donnait des médicaments, il écoutait les gens, et tous le monde le regardait avec admiration... et nous, nous étions ses enfants !
Nous, par exemple, nous pouvions aller dans son bureau le soir. Il suffisait de frapper doucement, il disait "entrez" et nous glissions nos têtes par l'entrebâillement. Assis dans son grand fauteuil en cuir, penché sur son large bureau en bois sombre, la lampe éclairant d'une lumière douce la pièce, il relevait la tête, nous souriait "Oui ?". Nous étions pétrifiés de timidité, qu'il était beau !
Ah ce papa ! Normal que le monde entier voulait le rencontrer, il était certes impressionnant, mais vraiment de tous les papas du monde, c'était bien le nôtre le plus extraordinaire !
La première était spacieuse, aux murs blancs ornés de tableaux, moquette rase grise, des chaises achetées comme tous nos meubles d'alors chez des brocanteurs que maman écumait. Au centre une table basse, lourde, en bois épais et les magazines renouvelés chaque semaine. Juste à côté les fameuses toilettes chics dont les murs étaient tapissés d'un gros cannage doré sur fond noir, moquette épaisse d'un noir brillant. Juste à côté du petit lavabo un collages de maman, qui disait que c'était l'endroit idéal pour s'y plonger des heures à rechercher les multiples détails.
Bien avant que papa fasse transpercer le mur donnant sur l'appartement qui viendrait prolonger le nôtre, nous vivions dans la partie droite séparée par une porte vitrée. Il y avait donc d'un côté le bureau, la salle d'attente, le salon chambre à coucher des parents, la grande salle de séjour. De l'autre, nos trois chambres, la cuisine et la salle de bain surélevée, protégées des regards curieux des "malades".
A tour de rôle nous ouvrions la porte aux patients. Nous avions tous été brifés ; "Lorsque vous entendez sonner, mettez vous bien en face de la porte, ouvrez en faisant un sourire et dites "Bonjour Madame (Mademoiselle, Monsieur), donnez vous la peine d'entrer", un pas en arrière tout en tenant la porte, du bras gauche vous ferez un geste gracieux, demi cercle un peu lent, pour les inviter à entrer. "La salle d'attente est par-ici" direz-vous, puis vous les précéderez afin de les conduire toujours souriants, "Le docteur vous recevra dans un instant".
Et voilà, pas plus compliqué que cela. Nous repartions en courant dans nos chambres.
Les malades de papa n'avaient jamais l'air malades, parfois un regard un peu bizarre. Papa était docteur, il avait bien essayé de nous expliquer de quoi, franchement tout ce que l'on avait retenu, c'était qu'il valait mieux ne pas trop en parler à l'extérieur. Tout cela était mystérieux, mais tout de même nous étions très fiers d'avoir un papa si spécial que pleins de gens venaient voir, et qui faisait le soir des conférences. Ce n'était pas un docteur qui donnait des médicaments, il écoutait les gens, et tous le monde le regardait avec admiration... et nous, nous étions ses enfants !
Nous, par exemple, nous pouvions aller dans son bureau le soir. Il suffisait de frapper doucement, il disait "entrez" et nous glissions nos têtes par l'entrebâillement. Assis dans son grand fauteuil en cuir, penché sur son large bureau en bois sombre, la lampe éclairant d'une lumière douce la pièce, il relevait la tête, nous souriait "Oui ?". Nous étions pétrifiés de timidité, qu'il était beau !
Ah ce papa ! Normal que le monde entier voulait le rencontrer, il était certes impressionnant, mais vraiment de tous les papas du monde, c'était bien le nôtre le plus extraordinaire !
7 commentaires:
Le "geste gracieux" et le "demi cercle un peu lent" ne me semblent pas aussi simples, mais ce devait être beau à voir, les "malades" devaient être ravis de cet accueil !
Il est touchant, ce papa dont tu parles avec tant de sensibilité...
Moi j'aime t'imaginer en petite fille faisant entrer les patients avec grâce et retenue...
(Bon, dans ma tête je carricature : je te mets des noeuds dans les cheveux et une robe de mousseline à volants, mais c'est pas la Salle d'Attente du Papa, ça, c'est les Petites Filles Modèles !)
Très joli post !
Il la connaît ce Papa l'admiration que lui porte sa fille ?
J'ai dû louper un épisode, ou alors tu as bien aiguisé ma curiosité, voilà que j'ai bien envie de savoir quelle était la spécialité de ton si célèbre papa :)
C'est un bien joli hommage :)
Floh, je crois que Valérie en a parlé par le passé, quelque part dans le blog, mais je ne me souviens plus quand...!
C'est tellement ancré en moi, que je me suis surprise à l'utiliser tout à l'heure en invitant un propriétaire à entrer dans un appartement :D
Caroline, il était très impressionnant, et mes amies, bien que toutes amoureuses de lui, le craignaient intensément :)
Lancelot, nous étions habillées très "Jardin des Modes", mais pas de robe en mousseline. Coupe au carré, et guimpe blanche :D
Madeleine, je crois qu'un papa ne se lasse jamais de l'admiration de ses filles :)
Floh, il n'était pas connu à l'échelon national, juste régional, mais pour nous c'était quasiment MONDIAL !
Pablo, j'ai déjà parlé de la spécialité de mon père, si ce n'est lorsque j'évoquais la visite de Françoise Dolto ;)
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