Ils étaient venus me chercher à la fin de la séance, j'avais compté mes ventes, rangé les paquets de bonbons, popcorn et glaces non vendus, préparé ma caisse pour le lendemain, rapidement salué Dominique qui finissait la sienne et nous étions partis tous les quatre au bistro juste en face.
La soirée avait continué tranquillement, bières, perrier, cigarettes. A un moment j'avais dit à JP que je voulais rentrer parce que le lendemain je travaillais tôt, que j'étais fatiguée. Il avait fait mine de se lever, hésitant, j'avais compris. "Si tu veux reste encore un peu!" soulagé il s'était rassis. Je les avais salués d'un sourire, j'étais sortie dans le noir.
Nul doute que durant la nuit j'ai regretté de ne pas avoir continué la soirée avec eux. Nous serions rentrés en riant, légèrement éméchés peut-être. Ma nuit aurait été un peu courte, de toute évidence bien moins longue que celle que je vivais.
Et aujourd'hui ?
Aujourd'hui rien ! C'est juste une partie de ma vie, un instant qui m'a faite, sans doute différente, mais qui ne m'a pas détruite, qui a juste gravé dans mon histoire cette inflexion, comme un rocher un peu plus dur fait dévier le cours d'eau. Plus fragile et plus forte.
Qu'est-il devenu ? Où est-il ? Je n'en sais rien, il est depuis si longtemps hors de ma vie.
Certes cela reste indélébile, comme restera indélébile l'instant où mon frère a quitté la fratrie, où ma fille m'a regardée de ses yeux étonnés, découvrant le monde, où mon fils s'est endormi soulagé de se savoir enfin compris, où JP m'a embrassé fougueusement le premier soir .
Tous ces instants qui font une vie simplement.
Après avoir lu le billet de Maître Mô, je me suis posée la question, tout au long de la semaine et au fil des commentaires, "Étais-je vraiment sincère lorsque je disais ne pas en vouloir à cet homme, n'avais-je vraiment aucun désir de vengeance ?"
Sans hésitation, oui vraiment, et si par hasard je le savais libéré de ses démons, heureux dans sa vie, je crois bien que j'en serais heureuse.
La soirée avait continué tranquillement, bières, perrier, cigarettes. A un moment j'avais dit à JP que je voulais rentrer parce que le lendemain je travaillais tôt, que j'étais fatiguée. Il avait fait mine de se lever, hésitant, j'avais compris. "Si tu veux reste encore un peu!" soulagé il s'était rassis. Je les avais salués d'un sourire, j'étais sortie dans le noir.
Nul doute que durant la nuit j'ai regretté de ne pas avoir continué la soirée avec eux. Nous serions rentrés en riant, légèrement éméchés peut-être. Ma nuit aurait été un peu courte, de toute évidence bien moins longue que celle que je vivais.
Et aujourd'hui ?
Aujourd'hui rien ! C'est juste une partie de ma vie, un instant qui m'a faite, sans doute différente, mais qui ne m'a pas détruite, qui a juste gravé dans mon histoire cette inflexion, comme un rocher un peu plus dur fait dévier le cours d'eau. Plus fragile et plus forte.
Qu'est-il devenu ? Où est-il ? Je n'en sais rien, il est depuis si longtemps hors de ma vie.
Certes cela reste indélébile, comme restera indélébile l'instant où mon frère a quitté la fratrie, où ma fille m'a regardée de ses yeux étonnés, découvrant le monde, où mon fils s'est endormi soulagé de se savoir enfin compris, où JP m'a embrassé fougueusement le premier soir .
Tous ces instants qui font une vie simplement.
Après avoir lu le billet de Maître Mô, je me suis posée la question, tout au long de la semaine et au fil des commentaires, "Étais-je vraiment sincère lorsque je disais ne pas en vouloir à cet homme, n'avais-je vraiment aucun désir de vengeance ?"
Sans hésitation, oui vraiment, et si par hasard je le savais libéré de ses démons, heureux dans sa vie, je crois bien que j'en serais heureuse.
20 commentaires:
pas la moindre dent contre lui? -rhooo-
plus sérieusement, merci beaucoup pour le lien, qui fait un bon écho à ma pensée du soir en voyant "l'abolitionniste" (assez nul par ailleurs), au sujet du peuple réclamant la tête des accusés. Je suis toujours dégoûtée par ces esprits de vengeance sans pour autant être en mesure d'affirmer que moi, dans la même situation je n'agirais pas ainsi... Alors à chaque fois je pense à toi et ça me permet de défendre un peu plus sereinement mes idées. C'est fou ce que cette vieille rengaine du "si ça vous arrivait vous auriez aussi envie de le voir crever" peut fausser le débat sur la prison.
Tout d'abord laisse ma pauvre dent mobile tranquille, c'est pas gentille gentille de se moquer de ma dentition.
Et si tu as le temps, je te conseille vraiment de t'attarder sur ce blog vraiment bien !
Bien que je ne sois pas rancunier, il est des épisodes de ma vie que je ne pardonne pas malgré tout.
C'est là un témoignage de ta force certainement, mais d'une vraie beauté aussi.
Spontanément, j'ai envie de dire "quelle force", et ça ne doit pas être faux.
En même temps, je me dis qu'être capable de pardonner, c'est aussi pouvoir passer à autre chose, non ?
Je t'embrasse, quoi qu'il en soit.
Tous ces instants qui font une vie simplement Il y a des intants qu'on préfèrerait oublier non ?! Plutôt que le pardon, j'aurais tendance à vouloir gommer pour oublier - quand c'est possible ! (un peu confus mon propos)
Je partage pleinement ce que tu dis là: "C'est juste une partie de ma vie, un instant qui m'a faite, sans doute différente, mais qui ne m'a pas détruite, qui a juste gravé dans mon histoire cette inflexion, comme un rocher un peu plus dur fait dévier le cours d'eau.", je ressens la même sensation au souvenir d'instants qui m'ont paru sur le coup insurmontables, puis qui ont petit à petit pris leur place dans ce qui, au bout du compte, fait "mon" histoire, celle qui m'a fabriquée telle que je suis aujourd'hui, la somme de tous ces instants, les pires et les meilleurs...
Cela dit, merci pour le lien qui m'a fait découvrir un blog passionnant.
Oui, quelle force – et quelle sérénité, aussi.
Oui Anne, pouvoir avancer, ne pas rester stagnante, fossilisée par la rancoeur. Olivier, je n'ai aucun mérite, je suis quasiment incapable de rancune, soit j'efface, mais j'efface tout, soit si c'est impossible d'effacer, je digère, j'intègre.
Par contre, je doute que j'en serais capable si l'on s'en prenait à mes enfants. Et pour me protéger de mes instincts primitifs, je compterai avant tout sur la justice qui saura alors non seulement me protéger de mes bas instincts, mais également me guider vers le pardon.
Je vous lis depuis un certain temps (tout comme Eolas, Maître Mô etc). Loin d'avoir votre capacité de pardon j'essaie néanmoins de ne pas me fermer sur mes idées et mes réactions instinctives. Mais il y a une chose que je ne pourrais jamais "intellectualiser" et c'est une agression contre mes enfants.
Cela dit il m'est venu la question suivante : JP ne s'est-il pas senti coupable/responsable de ce qui vous est arrivé ce fameux soir ?
Avec toujours beaucoup de plaisir à parcourir vos pages :-)
V.
Pour avoir eu la chance de pouvoir éviter le pire, je rejoins assez Véronique en ce qui concerne mes enfants, mais je salue la force de caractère, la bravoure dont tu fais preuve, vraiment...
Un seul petit mot: outch...
Tu as beaucoup de courage et de force. Dans de même circonstances, je ne crois pas que j'arriverais à pardonner.
Zut... je ne voulais pas commenter en anonyme, j'ai appuyé trop vite.
Je me demandes si justement on ne peux pas plus facilement pardonner si on sait que l'agresseur a été pris, a été jugé, que s'il est resté libre d'en agresser d'autres.
Fabulous Fab, es tu celle que je connais ?
Tilli, je dirais plutôt que lors d'un procès, on est reconnu comme non coupable. J'étais au mauvais endroit au mauvais moment certes, mais cela aurait pu être quelqu'un d'autre.
Il y a aussi, non seulement vingt six ans de cela, mais aussi dix ans d'analyse.
Tout de suite après je voulais mourir ou que mon agresseur meurt (soit l'un soit l'autre, juste effacer le risque qu'il recommence avec moi) Il m'a fallu des mois je crois pour me reconstruire. Je désirais qu'il soit emprisonné toujours dans l'idée de me protéger, pas dans un but de vengeance primaire, il me faisait terriblement peur. Mais je n'ai jamais, je crois, eu le désir de lui faire du mal, alors que JP oui. D'ailleurs mes amis d'alors ainsi que les policiers qui avaient recueilli ma déclaration, étaient bien plus violents dans leurs désirs de vengeance.
J'avais un avocat, qui bien que peu chaleureux, me donnait une impression de protection. Il me défendait vraiment, pourtant je me souviens que certaines expressions qu'il employait au sujet de mon agresseur me semblaient excessives.
Bien évidemment aussi, je n'aurais pas pu écrire cela tout de suite après.
Et pour ce qui est de la culpabilité de JP, aussi étonnant que cela puisse paraitre, il n'en a jamais parlé.
J'admire ton courage et surtout cette sérénité qui te permet d'en parler aussi librement. 10 ans d'analyse.......
Heureusement qu'il y a ces dix ans de travail psy après cette grande blessure. Je t'admire cela n'a pas dû être facile tous les jours.
Je trouve que c'est même une "double blessure" dans la mesure où tu as dû te justifier, raconter devant un tribunal...
Est-ce que les blessures enfouies, niées, ne ressurgissent pas un jour ?
Fauvette, je suis persuadée que ce qui n'est pas mis à jour ne peut que germer, et trop souvent mal germer. Cela ressort d'une façon ou d'une autre. Ce n'est pas pour rien que l'on dit mal à dit :)
Jipes, je ne crois pas qu'il faille de l'admiration, j'ai une propension à aimer la vie c'est tout.
Te lire et méditer...
Cela aide incroyablement à relativiser d'autres problèmes. En te lisant, je ne sais pas si l'on peut parler de "force". Mais, ce qui ressort, c'est une impression de confiance. Confiance en la vie, en l'avenir.
Merci, sincèrement.
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