dimanche 21 octobre 2007

Le poste de télévision

Depuis le 1er juin 1983 nous habitons au centre ville dans un soixante dix mètres carrés, un agréable trois pièces. Il y a presque deux ans que nous sommes devenus parents d'une blonde petite fille aux yeux bleus, notre couple est orageux mais nous nous aimons. Petit à petit nous nous installons "bourgeoisement". Nos étagères Louis Caisse repeintes en blanc, un ficus benjamina, la cafetière électrique, le téléphone, manque la télévision.

Une petite annonce dans le "74" propose une télévision d'occasion pour 2000 francs, je téléphone, prends rendez-vous pour ce samedi 10 janvier 87 et nous voilà partis avec nos copains Joanis et Maria. L'adresse nous conduit à La Roche sur Foron, dans une ferme. Le chemin est boueux il fait assez froid. Nous entrons dans la salle de séjour où trône la bête ! Énorme, recouverte d'un joli napperon sur lequel est posé une gondole brillante et une plante verte crevotante. Nous sommes un peu en avance et du coup ils n'ont pas eu le temps de l'allumer. Mais elle fonctionne, pas de problème ! Pour nous montrer la qualité de l'image ils la mettent en route. Il faut qu'elle chauffe, nous attendons quelques instants, d'abord le son puis vient l'image floue et ondulante, elle se stabilise, et petit à petit occupe la totalité de l'écran. Nous sommes séduits, nous l'achetons. Il faut ensuite, avec précaution et délicatesse la déposer sur la banquette arrière, emballée d'une couverture, une délicate odeur de ferme envahie la voiture.
Elle prend place sur la table basse de notre chambre, nous fêtons cette acquisition joyeusement et regardons notre première émission dans cette odeur particulière qui mettra quelques semaines à s'effacer. Nous découvrons "les nuls l'émission" que nous regarderons tous les soirs, et à midi souvent j'aime traînasser devant Jean Luc Delarue. Mais ma grande découverte est "Santa Barbara".
Un après-midi, alors que C. fait sa sieste, j'allume la télévision et me laisse embarquer dans une sombre histoire se passant au fin fond de l'Amérique. Au moment du générique de fin je réalise que c'est un feuilleton. Le lendemain profitant de la sieste de ma fille, je reprends le cours de cette histoire rocambolesque. Je n'ai aucune culture feuilletonesque, nous avions interdiction absolue de les regarder depuis que nous avions pourri les dimanches soirs de nos parents en les tannant pour aller chez notre grand mère paternelle regarder "Sébastien parmi les hommes". Le jour où la télévision était entrée à la maison, des consignes strictes avaient été établies : pas de feuilleton, uniquement les films "pour tous" puis "pour adultes et adolescents" recommandés par Télérama et de toute façon de manière très sporadique. Alors bien sûr, je n'imagine pas ce que peut être un soap opéra et chaque jour j'allume ma télévision pour suivre les aventures rocambolesques de Robin Wright.
Un jour, alors que j'ai loupé un épisode, je cherche le résumé de la veille dans Télérama et juste à côté du titre, un chiffre entre parenthèse : 278 ! Je souris en pensant à un trait d'humour du journaliste exagérant le nombre d'épisodes. Quelques temps plus tard, un des acteurs est purement et simplement remplacé par un autre acteur, le personnage garde son nom et aucune allusion n'est faite durant l'épisode sur cette invraisemblable métamorphose. Non seulement cette histoire ne semble pas avoir de fin, mais les acteurs sont interchangeables sans que l'on soit prévenus... je prends conscience que peut être que le chiffre indiqué à côté du résumé journalier est celui du nombre d'épisode réellement projeté. Je commence vraiment à en avoir marre d'être scotchée tous les après midi devant la télévision, marre de cette histoire à rallonge. Je me lasse et mon assiduité mollie. Alors lâchement j'abandonne "Kelly" et reprends ma liberté.
Je garderais malgré tout une certaine tendresse pour cette actrice et si par hasard est fait mention de la ville Santa Barbara lors des informations, je me surprends à fredonner "Santa Barbara qui me dira pourquoi j'ai le mal de vivreeeeee..."

8 commentaires:

Anonyme a dit…

Je m'étais laissée prendre comme ça par "amour, gloire et beauté". Il continue toujours, la jeune fille d'antan est maintenant grand mère et quand, par hasard, j'allume la télé à cette heure là j'ai l'impression que rien n'a changé ;-)

malie a dit…

A mon avis on s'est tous laissés prendre à un moment donné...

bricol-girl a dit…

Que celle qui ne s'est jamais fait prendre me jette télérama à la figure!

Anonyme a dit…

C'est amusant ce billet ! L'achat de la télé d'occas... On voit que les temps ont changé, maintenant les jeunes couples m'ont plutôt l'air branchés ordinateur et Internet.
Quant aux feuilletons télé, je te comprends, c'est comme les romans-photos on peut se faire prendre !

Valérie de Haute Savoie a dit…

Il faut se laisser avoir une fois pour ne plus jamais succomber :)

Anonyme a dit…

Nous avions droit chez mes parents de suivre les feuilletons et j'ai un grand souvenir de "belle et Sébastien" et plus tard du "jeune Fabre". J'aime beaucoup ce retour en arrière sur une vie à deux qui commence. A bientôt.

Valérie de Haute Savoie a dit…

Maintenant que tu parles du jeune Fabre, il me semble que nous avions tout de même regarder quelques épisodes d'un feuilleton dont le poney s'appelait Poly. j'en garde une impression de tristesse. Mais j'ai dû voir cela chez mes grands parents parce que chez nous c'était INTERDIT !

Anonyme a dit…

Poly, le jeune Fabre, Sébastien....J'ai été longtemps amoureuse de Medhi le fils de Cécile Aubry auteur d'un autre feuilleton miraculeux (pour moi), "l'âge heureux"....
Je me fais toujours avoir ... J'ai regardé en continu les desperate housemachin en dvd au début de l'été.