vendredi 27 mai 2016

Sous les pins



Elles dormaient depuis la mort d'Hervé, dans des cartons planqués sous les lits de la chambre d'enfant. Avant ce grand malheur, le rituel, institué par mon père lors des fêtes de Noël et nouvel an, comportait au moins une sortie du projecteur dans lequel papa faisait défiler les casiers remplis de notre petite enfance. Et nous nous extasions, riions, pinaillions, rêvions devant ces moments de grâce familiale.
Et puis cela est devenu trop douloureux de revoir certaines diapos, maman doucement pleurait, papa stoppait la projection, nous avons refermé la porte.

C'est en ressortant de vieilles boites à photos pour revoir un ami de Beaux Arts, mort en ce début d'année, que JP a pensé à s'offrir un appareil pour numériser les diapos. Mon vieux rêve de ressusciter l'enfance disparue était enfin imaginable. Et JP patiemment a commencé, lors de notre semaine alsacienne, à numériser une à une ces diapositives recelant des trésors.

Me voilà à Ravenne, discutant avec Maman, le petit déjeuner terminé, sous les pins, la mer si proche.
Je peux même sentir le bois craquer et le soleil chauffer la résine odorante.

mardi 24 mai 2016

hors du temps

J'avais mis dans la valise des livres et un ordinateur. J'ai lu, beaucoup, je n'ai guère regarder mon ordinateur, c'est JP qui l'a utilisé pour numériser des diapos de mon enfance. Nous étions en vacances, et cette semaine a été parfaite totalement parfaite.


La découverte de notre nouvelle chaudière, le soleil qui est venu chaque jour, les oiseaux qui n'en pouvaient plus de chanter, le printemps, toujours en retard dans les hauteurs, qui m'a enchanté pour la seconde fois cette année.

Devant la maison les pivoines encore bien emmitouflées, n'ont pas réussi à sortir de leur petits draps blancs, mais juste en dessous, le muguet bien blanc pimpant s'offrait un premier mai tardif.

La viorne couverte de ses merveilleuses boules blanches, parfumait dès le soir tombant, la terrasse ou mourrait le dernier rayon de soleil.

Nous étions seuls et Chamade s'en est donnée à coeur joie. Chaque porte, chaque fenêtre a été explorée, rentrer, sortir, miauler pour que l'on ouvre, se rouler dans l'herbe, courir comme si la vie en dépendait, chasser et tuer des musaraignes, dormir dans le soleil et lascivement se déplacer en suivant celui ci, le bonheur tranquille.


Le lundi nous étions invités à Mittelhausbergen, chez des amis que nous n'avions plus vus depuis pffffou au moins quinze ans. Nous avons bavardé et sommes allée dans l'après midi faire un tour à Strasbourg, ahhh Strasbourg ma ville chérie. J'ai revu l'immeuble rue de la haute Montée, la fenêtre d'où je suis descendue par la grande échelle, la petite rue des dentelles très chic maintenant, le nouveau Starbuck où je pensais trouver un mug dédié à ma ville (mais non c'est en juin seulement qu'ils seront vendus et nous y retourneront).


En revenant vers notre village, brusquement comme une évidence, je me suis dit que nous pourrions revenir habiter en Alsace. Une fois que je serais à la retraite, se rapprocher de notre maison, vivre dans une belle ville, et JP n'avait pas l'air contre...

vendredi 13 mai 2016

semaine tendue

Je ne sais pas pour vous, mais chez nous à l'agence, depuis lundi, les clients sont très remontés. D'ailleurs depuis que j'ai démarré dans cette branche, le premier juin cela fera huit ans, il me semble que les gens se lâchent de plus en plus facilement. L'injure est facile, le mépris souvent de rigueur, au point que lorsque l'on a au bout du fil une personne polie, agréable ou simplement normale, on a envie de l'embrasser. Il est sans dire qu'un client agréable devient vite mon chouchou et que je me décarcasse pour le satisfaire, alors qu'un grossier personnage aura le strict minimum exigé et sans sourire.

Mais malgré tout ce qui se dit sur "les agences tellement voleuses et tellement qui servent à rien", j'aime ce boulot, j'ai du plaisir à le faire bien, toujours. Et il m'est justement difficile de ne faire que le strict minimum, pour cela il faut avoir été très très désagréable. Malheureusement d'ailleurs pour ces clients là, j'ai une mémoire d'éléphant, je ne les loupe pas, me fait un plaisir à leur rappeler leur goujaterie. Certains se font petit-petit, pensant m'amadouer, mais trop loin, c'est trop loin et il leur faudrait des trésors de gentillesse pour effacer leurs mots souvent très violents.

J'ai depuis ces huit ans, amassé des tonnes de souvenirs, je retrouve parfois au gré de reprises d'agence ou de portefeuille (oui depuis mon entrée nous avons absorbé plusieurs agences, nous sommes sérieusement développés) des locataires qui semblent heureux de revenir à leurs anciennes amours, d'autres moins, qui pensaient m'échapper et sont hélas pour eux de nouveau dans mes pattes. Je suis la pire et la meilleure, je reçois des chocolats mais aussi des courriers me vouant aux pires gémonies. Je les lis, les transmets toujours à la direction, je me garde les mots gentils, partage les chocolats, je fais mon travail.

Mai et Juin sont des mois de transhumance, je jette un oeil sur les courriers de départ guettant les noms sur les préavis. Un grossier qui s'en va me fait danser de joie.

Bonne chance au prochain gestionnaire !

mardi 10 mai 2016

Un pont

Puisque nous ne connaissons pas encore le fonctionnement de notre chaudière écolo nouvellement posée, nous n'avons pu passer les quatre jours du pont en Alsace et faute de gardien de chat sommes restés "à la maison".

Je m'étais fait un petit programme du genre, faire les joints de la baignoire, ranger une bonnetière fourre tout dont je ne savais plus trop d'ailleurs ce qu'il y avait de fourré tant elle était foutoiresque, coudre les boutons esseulés, apporter des trucs à Emmaüs, ranger des papiers et et ...

Boire un coup chez un copain qui tient une buvette au Creux de Genthod, faire une balade en vélo, lire, faire la grasse mat', prendre un bain au savon noir, profiter du temps en jardinant ...

Nous avons traversé Genève qui se préparait pour le marathon Unicef, les pelouses resplendissant sous le soleil était couvertes de couples amoureux, de chiens, lapins, enfants aux ballons. Du jet d'eau fièrement naissait un arc en ciel, avançant au pas sur le pont du Mont Blanc nous avons mis une heure pour arriver au Port Ginata.


Tranquilles nous sommes restés à bronzer au soleil, les oiseaux quémandant les miettes du petit pain accompagnant la délicieuse saucisse sèche de mouton que nous grignotions en sirotant le spritz de JP et mon coca zéro pour moi (hélas oui, mais l'Eté arrivant, il me faut perdre deux petits kilos mal placés).

Le lendemain nous avons enfourché nos vélos et sommes retournés à l'étranger. Deux heures dans la campagne, en petit chemisier sans manche, ballerines et sac à dos. Le bonheur.


Nous avons croisé un héron, un vol de milans noirs guettant les mulots dérangés dans leur sieste par un gros tracteur, des mémères à chienchien, des champs de colza jaune doré, des immenses étendues de luzerne, des crottes de chevaux, un bistrot.

Dimanche soir il me semblait que cela faisait deux semaines que j'étais en vacances !