dimanche 22 décembre 2013

Système

Pendant que tranquillement nous préparions Noël, que nous réglions quelques dossiers avant le départ en vacances, là bas sur son tout petit caillou, un cyclone violent et ignoré du monde s'amusait avec les arbres, les champs et les masures.

Elle, je la savais à l'abri, dans une maison de béton, entourée de copains et pourvue en eau, boissons et victuailles. Tant que son téléphone était rechargé nous avons pu un peu communiquer. Et lorsque le cyclone s'est éloigné, elle m'a rassurée d'un bref sms.

Le tout petit point rouge dans le cyclone de gauche, c'est Rodrigues. 

Pour les cabanes accrochées aux pentes de cette petite île, le cyclone n'a laissé aucune chance.

Sur ce tout petit caillou l'enfer se déchaînait, mais le reste du monde s'en fichait. 

Ce n'est pas tant que le monde soit indifférent à ce cyclone qui me fascine, mais plus sur le fait que le monde peut s'écrouler quelque part ou pour quelqu'un, et que le reste de l'humanité continue à vivre. 
Lorsque la mort d'un proche vous happe dans l'indicible, que votre vie s'écroule,  le monde tranquillement chemine. Et c'est à ces instants là que l'on réalise que l'on est pas grand chose, un tout petit caillou perdu au milieu d'un océan, ignoré du monde.

mercredi 18 décembre 2013

Récurrence

Il ou elle arrive un matin, sans prévenir, plus exactement sans que nous ayons été prévenus. Gauche, planté-e sur ses deux jambes bien raides, la tête un peu basse, les yeux gonflés de sommeil, légèrement en retrait du chef qu'il ou elle considère avec crainte. Son sourire souvent agrémenté de bagues dentaires, il ou elle nous scrute discrètement, c'est LE, LA stagiaire que l'on va se coltiner une, voir deux semaines. Celui ou celle à qui il faudra trouver un truc à faire, intéressant si possible, amusant pourquoi pas, un truc qui lui fera passer sa semaine avec plaisir et qui lui laissera un bon souvenir à raconter à ses copains qui eux se seront fait iéch à mort.

Cette fois-ci nous avions il ET elle. Deux d'un coup et un boulot de fou sans temps morts.

Alors nous avons déployé des trésors d'imagination pour leur donner des petites choses à faire, chaque jour différentes, leur montrer l'éventail de notre travail. 

Lui, rigolo et plein d'énergie, s'épanouissait de jour en jour. Elle, un peu molle, arrivait dix minutes en retard matin et après midi, trainant son pas nonchalant, le regard déjà blasé d'une vie commençante. 
Lui, s'inondait de parfum chargé en testostérone, mais ignorait l'usage du savon. Elle, s'affalait sur une chaise, et soupirait à la moindre demande. 

Nous les avons trimballés en visite, état des lieux, fait faire des bons de commande, distribué le courrier, recopier des constats au propre, fait raconté un peu leur vie, leurs envies. 

Lui veut être commercial, elle, mannequin, policier ou hôtesse de l'air. Lui a trouvé très vite un charme fou à ce boulot, ou plutôt à la toute jeune fille de l'accueil, elle pfffff elle a trouvé ça longgggg, mais longgggg.

Et puis ils sont repartis et sans doute ne les reverrons nous plus. Sur son rapport de stage elle notera que l'outil emblématique d'une agence immobilière est le coupe-papier (parce que ça évite de prendre les mains pour ouvrir les enveloppes) et que son occupation principale aura été de regarder le plafond, "parce que si elle a fait ce stage c'est parce qu'on l'a obligée". Lui ne pourra pas dire combien il a apprécié la petite jeune de l'accueil, mais il repart avec une idée sans doute plus précise de ce qu'est une agence, et combien l'on peut s'amuser même si le boulot est parfois vraiment ingrat.

Nous avons éteint la bougie désodorisante, et attendons les prochains qui ne sauront tarder.

mercredi 11 décembre 2013

Au revoir

A cette époque nous squattions, tranquillement, en plein centre de la Petite France.

Strasbourg, petite rue des dentelles, maison à deux corps, reliés par une passerelle en bois couverte. 
Il y avait Charly, Francesca, Anne Marie et nos amants de passage. Au premier habitait un jeune couple, qui, il me semble, payait un loyer. Au rez de chaussé un local abritait une association de sourds et malentendants, et un ou deux appartements cachaient quelques vieilles personnes fantomatiques.
C'était notre maison, nous y étions bien, électricité, eau courante, pas de chauffage si ce n'est un radiateur électrique autour duquel nous nous serrions les soirs d'hiver.
On fumait un peu d'herbe, du shit, j'étais la reine des joints parfaits, on écoutait de la musique, tout le temps.
J'avais élu domicile sous les toits, un matelas, des bougies pour m'éclairer, une combinaison de plongée prêtée par mon grand frère dans laquelle je m'emmitouflais pour dormir au chaud, et, une radio à piles allumée toute la nuit. 

J'écoutais... STUDIO DE NUIT, chaque nuit, toutes les nuits.

J'aimais sa voix, les surprises des rencontres, fascination de cette vie nocturne parisienne. Du fond de ma province, de cette nouvelle vie d'indépendance, Jean Louis apportait le rêve d'un bonheur lointain. Higelin venait de sortir BBH75 et nous étions tous amoureux d'une cigarette, je découvrais Patti Smith, Brian Eno et Bryan Ferry, Lou Reed, je honnissais la variété française de cloclo et sardou.

Sous mon toit grelottante, Jean Louis me donnait l'envie de vivre, de découvrir, de supporter ma terrible solitude hivernale.

Il est parti hier... peut être retrouvera t-il Bashung

vendredi 6 décembre 2013

St Nicolas

Insomnie, petit truc qui me tracasse, sans gravité mais il est 4h30 et je ne me rendormirai plus. 
Sans bruit je me lève, j'ai largement le temps de faire quelques manalas pour le petit déjeuner de JP.


Pas de raisin ? Quelques pralines feront l'affaire. Et tant pis si certaines migreront pour devenir curieuses protubérances
.

Lorsque le jour se lève, alors que l'on célèbre sur la toile celui qui restera un des grands de notre humanité, mes petits bonshommes embaument la maison.