jeudi 31 janvier 2013

Remords Posthume

Je ne vais pas mentir, je ne le connaissais pas, presque pas.
Il avait emménagé en juin et dès le départ la relation avec l'agence avait été houleuse. Il était exécrable tout simplement.

Au début je suivais cela de loin, Samuel avait fait l'état des lieux ; à lui le plaisir de régler les problèmes multiples, avérés et imaginaires.

En Juillet Sam avait quitté l'agence et j'héritais donc du fardeau.

J'avais tenté de le raisonner, il m'avait rétorqué que maintenant le but de sa vie serait de me pourrir la mienne jusqu'au bout. Voilà... Nous ne nous connaissions pas... jamais vu.
Petit à petit il s'était calmé, j'avais fait faire les travaux demandés, la relation était devenue presque sereine.

Et puis Janvier... loyer non payé. Merde me suis je dit, maintenant que son appartement est entièrement refait à neuf, que tout va bien...

Nous avons appris hier qu'il était mort fin décembre.

De ces six mois de rage, n'aurait il pas mieux fait de les vivre vraiment ?

Lorsque tu dormiras, ma belle ténébreuse, 
Au fond d’un monument construit en marbre noir, 
Et lorsque tu n’auras pour alcôve et manoir 
Qu’un caveau pluvieux et qu’une fosse creuse ; 

Quand la pierre, opprimant ta poitrine peureuse 
Et tes flancs qu’assouplit un charmant nonchaloir, 
Empêchera ton cœur de battre et de vouloir, 
Et tes pieds de courir leur course aventureuse, 

Le tombeau, confident de mon rêve infini 
(Car le tombeau toujours comprendra le poète), 
Durant ces grandes nuits d’où le somme est banni,

Te dira : « Que vous sert, courtisane imparfaite, 
De n’avoir pas connu ce que pleurent les morts ? » 
- Et le ver rongera ta peau comme un remords.

Remords posthume - Charles Baudelaire

mardi 29 janvier 2013

le 28 janvier

Hier cela faisait trente ans, trente ans que ce soir là ma vie avait basculée, brutalement. La nuit devait alors devenir pour longtemps source de terreur d'abord, puis d'angoisse, pour redevenir petit à petit, tout doucement, la nuit, tout simplement. Trente ans que c'est là, au fond de moi, malgré tout. Je sursaute encore lorsque derrière moi, on se met à courir et qu'un petit bruit de clef résonne en cadence. Mais je ne tremble plus en me garant dans une rue un peu sombre, je suis aux aguets c'est tout.

Parfois je me demande comment je réagirais si une fois de plus je me faisais agresser. Serais-je encore pétrifiée au point que mon cœur s'arrêterait à nouveau ce si bref instant, pour repartir dans la décharge d'adrénaline épuisante ?

Autour de moi chacun sait qu'il donnerait un grand coup de genoux entre les jambes, qu'il hurlerait pour se faire entendre, qu'il courrait sans se retourner qu'il...

Je sais moi la faiblesse qui plombe en même temps que la terreur explose dans la tête, mais toujours toujours je me demanderai si je n'ai pas manqué ce soir là d'un peu plus de courage.


mercredi 9 janvier 2013

20 ans ! le bel âge.


Ce neuf janvier là il faisait froid, si froid que les trottoirs étaient gelés, que le brouillard voilait la ville encore assoupie par les festivités passées. 

Je me souviens de tout, je me souviens de presque rien.

Vingt ans, vingt ans que des parents ont perdu un enfant, vingt ans que le mien, grâce à eux, vit.

 Merci, vraiment Merci !


Photo prise fin décembre 1992

mardi 8 janvier 2013

Un Rom un !

Oh merde non, encore ! De l'orange le feu vient de passer au rouge, une seule voiture devant moi, je vais y avoir droit, merde merde !
Avec de grands gestes le conducteur stoppe net celui, un peu rondouillard, qui s'avance l'air débonnaire, armé de sa raclette et d'une petite bouteille remplie d'eau mousseuse. D'une démarche chaloupée, sans arrêter son pas, il contourne la Toyota et se dirige vers moi qui saute derrière le volant, agitant les bras, secouant la tête, non non non !
Il me regarde, la tête un peu penchée, sourit, et je rigole.
Là, derrière le pare-brise, d'un geste il dessine un cœur qu'il chapeaute d'une virgule. Je n'ai que le temps de penser "Bon ben je vais me taper ce cœur toute la journée !", que paf la vitre complète est opaque, plus de feu, merde merde !
Il racle la vitre, rapidement, reste en pensée ce cœur, sa petite virgule rigolote, j'ai brusquement une bouffée de bonheur, légère. Alors, pour le remercier de ce minuscule moment plein de grâce, je lui donne une pièce, le feu vient de passer au vert.

Et je me dis que ce n'est pas cher payé cet instant hors du temps, un pare-brise propre qui plus est !

dimanche 6 janvier 2013

un soir

Nous venions à peine de finir le dîner, attendant que notre feuilleton (*) démarre nous bavardions tranquillement, jeudi soir le tout premier de l'année,  le téléphone avait vibré d'un message arrivé.
- Tu peux me rappeler s'il te plait ?

Sans mot, je m'étais levée, pour rappeler ce fils qui, sans doute, n'avait plus de forfait. Au bout du fil la voix était grave, le souffle un peu court.
Mon ventre instantanément tétanisé, je plongeais dans l'aquarium.
- J'ai mal depuis quatre jours du côté du foie, ce soir j'ai de la fièvre, je suis angoissé, tu crois que je peux aller aux urgences ?

On est là, serein, laissant la vie s'écouler sans la voir, rien... et tout à coup on est de l'autre côté, rejeté au tout début de l'histoire, tout remonte en bloc, les odeurs, les bruits, les souffrances, tout.
Une petite pichenette de rien du tout et l'on est prêt à se noyer.

Alors il est parti, tout seul aux urgences et nous avons attendu, unis et si seuls.

Au bout de la nuit nous avons su que tout allait bien, un virus banal sans doute, un foie en pleine forme, la vie pouvait à nouveau s'écouler.

Et malgré ma nuit hachée, malgré l'angoisse diffuse se délitant lentement, je chantais en partant travailler.


* Oui oui je parle encore de feuilleton et non pas de série, marque de mon grand âge.

mardi 1 janvier 2013

Bonne Année !


Fasse que cette année ne perpétue pas la malédiction qui m'accompagne les années se terminant par 3...

 A tous qui passez par ici, je vous souhaite une très très douce année.