vendredi 25 avril 2014

Ce parfum d'enfance

Souvent, lorsque le soleil brille, je vais au bureau à pied, une bonne vingtaine de minutes qui me permet d'afficher mes presque dix mille pas en fin de journée.
Je choisi les rues calmes, sans voitures, je marche et je suis bien, dans ma bulle, à l'affut des odeurs printanières.
Il y a la rue Molière, dont la glycine sent si bon que cela est stupéfiant. Le parc où l'Eté a déjà pris ses quartiers emplie d'enfants, de poussettes et de femmes couchées dans l'herbe les jupes relevées pour que les jambes bronzent. Il y a surtout une rue, loin du bruit, où des chats traversent sans se presser, une rue où les grappes de fleurs d'un lilas sont encore à porté de nez.
Je m'arrête, délicatement ramène de la paume de la main cette grappe mauve, plonge mon nez...

... et remonte du fond de mon enfance ce parfum plein de promesse d'une fin d'année scolaire. 
Le jour où enfin les portes de la prison s'ouvriront, oublier deux mois durant ce cauchemar qu'est et restera à jamais : l'école !

vendredi 11 avril 2014

pas à pas


J'ai eu pour mon anniversaire un bracelet qui mesure mes pas. Alors, loin du bruit, je marche, pas à pas, je fais des kilomètres que mon bracelet enregistre minutieusement, des centaines de pas, l'un derrière l'autre, dans l'herbe, sur les chemins, je marche et traverse le terrain, chaque pas est comptabilisé. 
Et le soir, au moment de fermer les yeux, je contemple mon score.

Hier soir il manquait un petit millier de pas pour que j'atteigne les 10000 nécessaires pour être félicitée. 
Alors, malgré le soleil couché derrière la montagne, je suis partie faire un tour, j'ai cueilli des violettes, surpris un chevreuil bondissant dans les bois, l'ai entendu aboyer comme un chien fou, j'ai humé le parfum suave d'un arbre en fleurs, marché 1000 pas, et au retour j'ai posé mon bouquet dans un tout tout petit verre.

Je voudrais toujours marcher, pas à pas, dans le silence.

mardi 8 avril 2014

1957


Le huit avril mille neuf cent cinquante sept, à sept heures cinq, je prenais ma respiration. Et cela fait  cinquante sept ans, plus ou moins légèrement, que je respire.

Alors, pour m'éloigner de tout ce qui fatigue, je suis partie, mon chat dans le panier, vers mon Alsace natale. Et depuis dimanche onze heures, je suis seule et je lis, je trafique, je parle aux oiseaux, au soleil et aux forêts...

Ce matin la pluie s'est invitée, pour quelques heures me dit météo France, je finirai le livre de Cyrulnik, mettrai du bois dans la chaudière et tout à l'heure j'ouvrirai mes cadeaux, allumerai mes deux bougies et me chanterai Happy birthday to me. 
Je suis seule mais entourée de mes fantômes chéris, mon grand père mort lorsque j'avais à peine vingt ans, mon grand frère pour mes vingt six et juste après ma grand'mère de Strasbourg, beaucoup plus tard Mamie de Mulhouse. 
A minuit pile C. a appelé du pays des kangourous, et juste avant d'entrer en cours G. m'a envoyé un message plein de tendresse. JP qui sans doute dort encore avait glissé son cadeau dans mes bagages, mais je l'ouvrirai plus tard, j'attends le soleil.

Au saut du lit, j'ai vu par le fenêtre, une biche gracieuse qui broutait tranquillement, personne aux alentours, le voisin si vieux aperçu hier debout contemplatif sous ses cerisiers, reste invisible. Il pleut et j'ai ce matin cinquante sept ans !