dimanche 30 septembre 2007

Dimanche calme, ensoleillé et bien plus doux que ces trois derniers jours. Toutes les fenêtres sont ouvertes, Chamade se repose sur le linge propre et pas encore repassé.

Je ne sais pas quand j'aurais la réponse à mes entretiens d'embauche. Je devrais être officiellement fixée dans les quinze jours, mais je crois que je le saurais bien plus tôt. J'aimerais tant avoir cet emploi qui me réconcilierait avec moi-même et avec les autres. Je travaillerais plus que dans mon emploi précédent, je gagnerais à quelques euros près la même chose et pourtant je sais que c'est cela que j'aime faire, je me retrouverais. Je crois que je ne suis pas destinée à devenir riche !

Les nouvelles de Hongrie sont bonnes, C. apprend le hongrois en binôme avec un jeune Hongrois, qui lui, apprend le français. Elle a démarré ses cours à la faculté de Budapest et petit à petit trouve ses marques. Elle n'a pas encore internet, mais nous arrivons de temps en temps à bavarder sur msn lorsqu'elle trouve à se connecter. J'ai l'impression qu'elle a l'air bien là-bas et qu'elle a déjà réussi à doucement s'intégrer.

J'ai regardé hier soir, "Indigènes". Je suis étonnée de l'engouement qu'il y a eu pour ce film. Et j'ai été assez stupéfaite d'entendre des alsaciens de 1944 sans aucun accent ! Des alsaciens sans accent, c'est invraisemblable tout simplement, du moins dans ces années là. Mes grands parents, qui pourtant étaient d'un milieu plutôt aisé, avaient tous l'accent alsacien. En résumé j'ai trouvé que ce film était un peu cheap !
Tout à l'heure j'ai survolé le match de rugby, je n'y comprends toujours rien...je passe le temps... je suis en attente...

Demain est un autre jour....

vendredi 28 septembre 2007

beaux arts


Nous dessinions tous le temps, un posait et le reste, studieusement, essayait d'être le plus approchant du modèle. Je savais rester immobile un temps infini et j'étais donc souvent croquée par les copains des beaux-arts. Curieusement je n'avais aucune gêne à être au centre, dans des positions parfois intenables, moi qui prenais chaque matin mon courage à deux mains avant de sortir pour affronter le regard des inconnus. Je ne me trouvais pas belle, bien trop grosse, manquant de grâce, un animal un peu pataud. Mais cet exercice ne me posait aucun problème. J'étais là, immobile, et mon esprit s'évadait loin de ce corps qui, suivant les angles et suivant les dessinateurs devenait autre.
Il y a quelques années, une de mes amies des Beaux-arts a retrouvé un de ces portraits et me l'a offert. Manque juste la couleur pourpre de ma chevelure de l'époque, je me rappelle que j'adorais ces bottes.

jeudi 27 septembre 2007

Dès le départ je le précise, je n'ai aucune objectivité concernant la polémique autour du livre de M. Darrieussecq. J'ai lu, à sa sortie, le livre de Camille Laurens. Je l'ai lu après que mon amie L.A., avec qui je partageais toutes mes joies et toutes mes peines, m'ait demandé de le lire. Elle venait de perdre son enfant, le mien luttait de son côté, et ce livre si juste mettait en mots la douleur que nous vivions. Je ne peux donc être objective. De Marie Darrieusseck je n'ai tenté de lire que truisme, conseillé également par L.A., mais le livre m'était tombé des mains. Je n'ai plus jamais approché un de ses livres et suis donc tout à fait partiale.

Dès la sortie de son nouveau livre, j'ai su que je ne le lirais pas. Je n'ai pas l'exigence de la véracité d'une histoire, c'est juste que là quelque chose que je n'ai pas cherché à définir sur le moment, me dérangeait profondément.
Et puis est venue la polémique, les débats, les clivages. On aimait M.D, on rejetait C.L. et vice et versa.


En suivant, cet après-midi un lien proposé par Etolane qui évoquait l'amour d'André Gorz pour son épouse, j'ai retrouvé le blog de Pierre Assouline. Et comme toujours d'article en article, j'ai parcouru les dernières notes et suis tombée sur ce billet du 23 septembre 2007 :

Tout à l’heure au Masque et la Plume, la tribune des critiques sur France-Inter, l’ami Jean-Louis Ezine du Nouvel observateur, qui dit souvent des choses très justes quand il ne se contente pas d’épater la galerie par des jeux de mots en faisant semblant d’avoir lu ce qu’il a à peine vu, a très justement récusé, loin de toute polémique sur le plagiat psychique qu’il juge absurde, le controversé Tom est mort de Marie Darrieussecq : “C’est roman dont le point de départ même est un contre-sens. Il est écrit au passé et la narratrice s’y souvient de la mort d’un enfant. Or, la mort d’un enfant, on ne peut la raconter qu’au présent de l’indicatif car on ne s’en souvient pas, on vit avec”. Tout est là. La question de l’authenticité résumée en trois mots. Rassurez-vous, cela n’entravera en rien son succès de librairie.

Ce billet faisait référence à un autre billet du 25 août consacré à la polémique.
Parmi les commentaires, celui de Sholem me sembla exactement en résonance avec ce que je ressentais depuis le début.
Je mets l'intégralité de son commentaire tant il correspond à ce que j'aurais voulu pouvoir mettre en mots :


C’est curieux. En lisant le début du post de Pierre Assouline, je pensais : « Perdre un enfant est une épreuve terrible mais se le faire voler par une rivale, une proche, une sœur, c’est encore pire.». Car il y a bien de ça dans cette histoire. J’ai sentiment qu’il ne s’agit pas que d’une histoire de plagiat (réel ou supposé) mais une histoire de rapt d’enfant. C’est sans doute cela que veut dire Camille Laurens en parlant de « plagiat psychique ». Pour Camille Laurens, le récit de la perte de son bébé était son enfant symbolique. Le récit de son deuil, c’était son bébé. Un bébé conçu avec ses mots qui sont sa chair (« corps subtil » dit Lacan) et dont l’éditeur est en quelque sorte le père. En quelque sorte. On peut même dire que ce livre est un enfant doublement symbolique, car le récit de son deuil a définitivement consacré Camille Laurens comme auteur, capable d’accoucher d’autres livres. En outre, il l’a consacré en tant qu’auteur d’un genre particulier (la littérature dite d’auto-fiction), c.a.d. chroniqueuse de sa propre vie. Or voilà, qu’une autre femme, Marie Darrieussecq, auteur elle aussi, choisit de rejoindre la même maison d’édition, principalement en raison de la publication du livre de Camille Laurens pour lequel elle ne cache pas sa fascination. Vampirisée par ce livre, elle va le vampiriser en retour. Tout ce petit monde (l’éditeur et ses auteurs-maison) cohabite comme une « petite famille ». Dangereuse proximité. Quelques années plus tard, Darrieussecq, qui entre-temps est devenue maman, écrit un roman à propos d’une mère qui perd son enfant. Pas un récit auto-biographique, non, un roman d’imagination. Ce n’est plus de l’auto-fiction mais de la fiction tout court. Camille Laurens se sent dépossédée. Elle considère l’enfant comme le sien. Il a les mêmes traits. Ce sont les mêmes tournures de phrase, le même rythme… Mais ce n’est pas tout. Preuve qu’elle considère l’autre mère comme illégitime, Camille Laurens en oublie même ce qui fait le ressort de tout écrivain et accuse Marie Darrieussecq de n’avoir jamais vécu de deuil et d’avoir tout inventé. Comme si ce n’était pas ça, la littérature. Et tout aussi symptomatique est la réaction de Darrieussecq qui croit devoir répondre sur le plan des faits et non pas celui de l’imagination littéraire « Non, j’ai déjà vécu un deuil dans ma famille » dans ce procès en légitimité. Une histoire exemplaire… jusqu’à l’éditeur, sommé de choisir, en quelque sorte, de quel « enfant » il est le père et qui se sépare d’une de ses deux auteures.

Après cela, je ne peux que conseiller "Marie Darrieusseck ou le syndrome du coucou" de Camille Laurens qui est paru dans le numéro 32 de la revue littéraire. (le télécharger directement sur le site) - J'aime ce qu'elle dit de la trahison qu'elle a ressentie et trouve très juste ses réflexions.
Je ne sais pourquoi dès le départ j'ai rejeté d'instinct le livre "Tom est mort", mais j'ai trouvé en parcourant les différents articles quelques réponses à mon malaise.

Pour clore ce billet, je ne peux qu'encourager la lecture de "Philippe" et aussi pourquoi pas "L'enfant éternel" de Philippe Forest ainsi que "Martin cet été" de Bernard Chambaz. Trois livres magnifiques.

mardi 25 septembre 2007

matin frais

C'était une très belle maison, biscornue, avec des marches de guingois, des chats à tous les étages, plus ou moins civilisés. La première à s'y être installée était Anne Marie. Elle louait un petit appartement sous les toits. Nous l'avions aidée lors de son emménagement, repeindre les murs en mauve, vert, rose, accrocher des rideaux de soie légers, assembler le lit en bois trouvé dans une brocante, nous étions en pleine période psychédélique. Les marches en bois grinçaient, les fenêtres fermaient difficilement, et il y avait partout des recoins secrets. Une merveille d'appartement, une merveille de maison. Y habitait déjà un couple, baba cool, champion du pâté végétal, se levant tôt le matin pour partir au travail. Mais les autres appartements étaient vides, la maison promise à la vente pour en faire des appartements, où viendraient plus tard y habiter les Strasbourgeois bourgeois. Tant d'appartements vides, et nous qui n'aimions rien tant que de vivre ensemble pour prolonger la fête quotidienne sans devoir nous déplacer... hop hop hop chacun vint avec ses affaires et squatta la moindre pièce vide. Vite vite ouvrir le compteur d'électricité... nous étions assurés pour un petit moment de vivre tranquillement en pleine Vieille France dans le plus beau quartier de Strasbourg. Petite rue des dentelles, notre QG ! Au rez de chaussé l'association des sourds et malentendants ne nous dérangeait que rarement lors de leur fête annuelle, mais sinon nous avions une paix royale. Le soir, en hiver, je montais dans ma chambre à moi. Entièrement éclairée par les bougies, je me glissais dans la combinaison de plongée prêtée par mon frère, le chauffage étant inexistant. J'écoutais Patrice Blanc Francard jusqu'à l'aube puis me laissais doucement envahir par le sommeil. Mais chaque matin, chaque matin passait la même vieille dame, et chaque matin elle promenait son vieux chien tout en hurlant, chaque matin, les mêmes ordres. Seigneur, Jésus, Marie Joseph sainte Eugénie et tous les anges Haup Haup Haup... le chien sur ces injonctions se mettait à allonger ses pas.... Orrh Got langsaum, langsaum dumele... le chien freinait son enthousiasme... et Haup Haup Haup... il repartait... Orrh Got langsaum, Langsaum....Orrh Seigneur Jésus et c'était reparti jusqu'à ce qu'elle atteigne le bout de la rue et bifurque vers la maison des Tanneurs.
Jésus Marie Joseph ste Eugénie et tous les anges..... je suis stressée à mort... je pars pour un entretien d'embauche qui me tient plus qu'à coeur !

Edit : première étape franchie ! prochaine étape vendredi à 18h30 ! Merci pour vos encouragements !

lundi 24 septembre 2007

Balcon d'automne

L'automne au balcon...

Première année où je plante des cyclamens.

Je n'aimais pas cette fleur, la trouvant trop symbolique des fins d'étés. Je n'aimais pas non plus son feuillage. Et puis cette année, cherchant chez Botanic de la couleur pour égayer mes balcons un peu trop verts, j'ai été attirée par l'odeur délicieuse, suave, des cyclamens. J'ai découvert que non seulement le cyclamen avait un parfum, mais que celui ci était une vraie merveille.

Cette année aussi, le petit olivier porte quelques olives. Je le regarde, et rêve de soleil méditerranéen.

Nous profitons encore de la douceur presqu'estivale de ce début d'automne.

dimanche 23 septembre 2007

mariage

Samedi, mariage ! Deux heures de trajets à travers le Valais pour arriver à St Pierre des Clages. Nous devions y être à 16 heures et comme toujours nous sommes partis "à la bourre". Déjà les mariages c'est pas franchement ma tasse de thé, mais là je ne connaissais que la mariée, ancienne collègue de JP et un des invités qui, heureusement, me fait toujours rire. Je savais aussi que JP conduirait à l'aller et que je serais chargée du retour... et donc, même si nous étions dans le royaume de la petite arvine, je me contenterais de jus de raisin, hélas !
Cela faisait déjà une bonne heure que nous roulions, il était plus de 15 heures ! Sur le plan il nous fallait quitter l'autoroute sortie 24 et nous venions tout juste de croiser la 10 ! J'avoue, nous avons hésité... continuer ? ou bifurquer pour aller à Martigny voir l'expo Chagall ? Tentant, mais pas très gentil pour la mariée. Nous avons donc continué notre route et miracle ! Nous sommes arrivés à seize heures exactement !
Nous nous sommes garés, collés aux vignes qui croulaient sous les grappes de raisin. Apparemment les vendanges venaient de débuter et les tracteurs se succédaient pour déposer les cagots débordant au pressoir du village. L'église de St Pierre des Clages est belle, vraiment belle. Nous sommes restés, tels les cancres, bien au fond. On ne sait jamais combien de temps dure ce genre de cérémonie, et c'est plus discret de quitter l'église, pour éventuellement attendre à l'auberge en face, sans faire déplacer tout un rang d'invités.
Nous avons eu droit à un passage du petit prince avec son essentiel qui est invisible pour les yeux... soupir... puis à Mère Thérésa qui compare l'amour à une lampe d'huile. Ensuite est venu le sermon (parle-t-on d'ailleurs de sermon lorsqu'il s'agit d'un mariage ?) où le prêtre, qui en plus d'être prêtre est guide de montagne nous a-t-il appris plus tard, s'est enflammé en parlant de l'amour. Il possédait, sans l'ombre d'un doute, son sujet sur le bout des doigts. Au moins cela avait l'heur de plaire aux cancres du fond où l'ambiance devenait au fur et à mesure de plus en plus détendue. Tout cela s'est terminé par une chanson de Sinsemilia, malheureusement inaudible, les baffles étant entrain de rendre l'âme.
A la sortie, à la place du riz, nous soufflions des bulles de savon. Il paraît que cela ne se fait plus de lancer du riz, par respect pour la faim dans le monde. Mais je ne suis pas sûre que toutes ces petites coupes de champagnes à bulle de savon soient moins nocives pour l'environnement. L'essentiel étant que ces bulles s'envolant autour de la mariée ravissante, étaient du plus bel effet !
Enfin, nous nous sommes tous retrouvés au caveau de Chamoson ! Où j'ai, malgré mon futur rôle de conductrice, goûté au "Johannisberg" accompagnant la viande des grisons et autres lards fumés. Moi, qui malgré mes origines alsaciennes, préfère le vin rouge, j'ai adoré le blanc que l'on nous a servi. Et maintenant je rêve de découvrir la fameuse "petite Arvine" dont notre ami nous a parlé avec tant de passion, parce qu'il a bien fallu que je continue la dégustation en ne buvant que du jus de raisin.
Nous avons aussi un peu parlé politique, notre souverain fait peur à nos voisins Suisses c'est indéniable. Mais chez eux aussi cela ne sent pas toujours très bon, à preuve la dernière campagne d'affichage mouton blanc, mouton noir.
La journée finissant, nous avons repris la voiture et sommes retournés, sans encombre, de l'autre côté du Lac.

samedi 22 septembre 2007

Chez SpyciNico on peut voir les armoires beauté de pleins de garçons et de quelques filles dont la mienne.
Dès que j'ai découvert les blogs, j'adorais tomber sur ce style de concours. Il y a eu celui dernièrement des photos de bureau, plus vieux celui des réfrigérateurs, chez Ron ce qu'on voyait de nos fenêtres...
Donc après la vue fantastique de ma fenêtre, j'ai pris en photo mon armoire de la salle de bain.

Bon ce week-end faut que j'm'occupe du spot, sans doute un fil qui s'est fait la malle !

vendredi 21 septembre 2007

Petites impressions du soir...

- Je n'ai plus aucun doute, Photoshop a été sacrément mis à contribution pour le "fameux" calendrier des rugbymen français.
- Les rugbymen français passent presqu'autant de temps couchés par terre "blessés grièvement" par les vilains irlandais que les footballeurs italiens !
- Les deux commentateurs TF1 sont pénibles mais pénibles (y-a-t-il une autre chaîne qui transmet les matchs ? parce que là je crois que j'ai atteint le sommet de saturation niveau commentaires crétins).
- Enfin, Bernard Laporte a toujours une tête de noeud.Je préfère nettement l'escrime et au moins je comprends tout !

jeudi 20 septembre 2007

...

Nous étions cinq enfants, il était l'aîné. Il jouait merveilleusement du hautbois.
Il restera l'éternel rêveur, mort il y a 24 ans à l'aurore naissante.

mercredi 19 septembre 2007

savoir-vivre


ce matin...

Savoir profiter de l'instant et optimiser l'espace !
photo cahier décembre 1964
Si je devais emporter un seul livre sur une île déserte, je me demande si je ne choisirais pas un très bon dictionnaire, je vis entourée de dictionnaires.
Depuis toute petite j'essaye d'apprivoiser l'orthographe, ou plus exactement la grammaire. Je me souviens de l'instant où la maîtresse disait "ouvrez vos cahiers, nous allons faire une dictée". Mes mains devenaient moites, mon cerveau se vidait de tout ce que j'avais appris, et en penchant la tête je priais que cela se passe le plus rapidement possible. Ensuite il y aurait le cahier à faire signer, le silence lourd et résigné de mon père suivi de cette légèreté d'avoir survécu jusqu'à la fois suivante.
Cela ne m'a pas éloigné du plaisir d'écrire, j'écrivais dans des cahiers, j'écrivais des lettres, même à ceux qui venaient de mourir et à qui je confiais mes peines, mes espoirs, et je déposais sur les armoires des enveloppes, persuadée qu'elles seraient lues par ceux de là-haut. Plus tard je passais des heures à créer des journaux inspirés de ceux que j'achetais en cachette -mademoiselle âge tendre, salut les copains- Il y avait la rubrique "courrier du coeur" bien sûr, et les pages mode qui me permettait de dessiner de sylphides jeunes filles qui avaient toutes le profil des "parisiennes" de Jacques Faisant.
Vers treize ans j'ai ouvert mon premier journal intime où je consignais au départ tout ce que je mangeais dans l'espoir d'arriver ainsi à maîtriser ce poids qui me persécutait, mais qui devint très vite le confident à qui je racontais mes multiples coups de foudre invariablement le seul l'unique et l'éternel.
Je grandissais, mon orthographe défaillante ne m'abandonnant pas. A vrai dire, les règles de grammaire étaient pour moi, incompréhensibles.
En 1988 je trouvais un emploi de secrétaire dans une boîte qui démarrait. Je devais répondre au téléphone, accueillir les clients et peut être de temps en temps taper un courrier. J'étais ravie, je sortais de ces petits boulots qui faisaient mon quotidien. Assez vite je dû rédiger des courriers, et là revint mon angoisse des fautes inévitables. Je me débattais vaille que vaille. Un jour, un des associés très gentiment m'expliqua la règle des accords avec le verbe être et le verbe avoir. Son explication lumineuse me fit découvrir que la grammaire n'était pas quelque chose de totalement illogique. Si l'on "était", on accordait, si l'on "avait" on n'accordait pas ! Bien évidemment il y avait des exceptions, mais tout à coup une porte si hermétiquement fermée jusque là, s'entrouvrait. Et je me rappelle le vrai bonheur que j'ai éprouvé ce jour là.
Cela fait maintenant près de 20 ans que je suis secrétaire, que j'écris des lettres et rédige des tas de rapports, lettres de mission et autres. Mon orthographe n'est de loin pas parfaite, mais malgré tout je sais maintenant écrire "bon anniversaire" et non pas "bonne...", que cauchemar n'a pas de "d" à la fin, que parmi n'a pas de "s" ... Chaque jour j'apprends, mais lorsqu'en relisant des billets écris sur ce blog, je découvre encore des fautes.... pffff je n'ai pas fini d'apprendre.

lundi 17 septembre 2007

En passant à l'instant devant les grilles...
Sans doute n'est ce qu'éphémère le temps d'une exposition, je parle de la couleur de l'eau, parce qu'hélas cette horrible petite fontaine est à demeure dans ce parc.

Je n'avais que mon téléphone pour prendre ce cliché, ce qui explique la qualité toute relative.

extrait

Gilda de Traces et trajets que décidément j'aime beaucoup, remonte au 17 septembre 1977 dans ses carnets, le jour de la mort de Maria Callas. Alors je ressors tous mes carnets où j'ai laissé des parcelles de ma vie et je cherche, moi aussi, ce fameux 17 septembre 1977... rien, j'ai sauté ce jour... je cherche dans un puis deux puis tous les carnets cette fameuse date... et il n'y a qu'en 1978 que j'ai noté quelque chose ce jour là.

17 sept 1978

La lune avait pudiquement voilée son éclat dans le manteau ombré de la terre. Les accents bretons glissants à travers les toits m'enveloppaient de certitude de rencontre. J'ai, prétexte, envoyé la lettre. Il était là, étranger si proche, nous avons déambulé sous la cathédrale dentelle. Parlant peu. Puis j'ai dormi dans les bras vibrations de cette maison. Le soleil réveil tendre et j'ai écouté une vie presqu'oubliée par un faux confort.
J'irais plus tard le long des rues, solitude, vacance. Senteur libertée... je suis bien.


Où étais-je ? Certainement à Strasbourg malgré l'évocation bretonne. Et sans nul doute légèrement ailleurs après avoir goûté à des substances illicites.

dimanche 16 septembre 2007

Il est un peu plus de midi et à peine ai-je accepté de porter plainte que nous sommes déjà en route, direction le commissariat. Non pas celui d'Annecy où mes amis m'ont, le matin même, déposée, mais celui de la ville qui, maintenant, me terrifie. Il faut que nous soyons là où l'agression a eu lieu, et cela ne me dit rien du tout. A notre arrivée, il est assez clair que cela n'enthousiasme pas les policiers de voir débouler des inspecteurs de Lyon, pour une histoire ne dépassant apparemment pas, le cadre de leurs compétences. Mais rapidement, les choses éclaircies sur le pourquoi de leurs présences, l'enquête commence. Tout d'abord déposer plainte. Je suis seule dans un bureau avec un policier qui me pose des questions, je suis comme détachée et m'efforce d'être la plus précise possible. Maintenant que je porte plainte, le risque que mon agresseur, si on ne le retrouve pas, mette ses menaces à exécution me terrorise. Je raconte tout, même ce qui m'a humiliée durant cette nuit.

... Durant cette nuit j'ai bien sûr été "violée", plusieurs fois. A ce moment là je quittais mon corps, je ne ressentais rien, absolument rien, j'étais morte par ma volonté et curieusement ces instants là sont ceux qui auront peut être laissé le moins de traumatisme. Ce qui m'a brisée de longs mois était bien plus la peur constante de souffrir, la terreur d'être à la merci d'une personne visiblement très dérangée. J'ai cherché tout au long de la nuit à trouver une porte me permettant d'accéder au délire de cet homme. Nous étions dans deux mondes différents. Tout en essayant de sauver ma peau, il fallait aussi que je me prépare à mon exécution que je présentais comme inexorable. Elle était programmée, mais telle la petite chèvre de Monsieur Seguin je cherchais à la repousser, jusqu'à ce que le jour se lève. Dans mon combat pour garder un peu d'intégrité, j'ai tout de même gagné le fait qu'il n'a pas pu toucher à ma bouche, d'aucune façon que ce soit. S'il l'avait fait je sais que j'aurais basculée dans la folie...

Dès la plainte enregistrée, on me fourre dans une voiture et toute sirène hurlante nous filons vers le lieu supposé de ma détention. Pendant ce temps un autre groupe part à la recherche de mon agresseur.

... D'un côté j'ai très peur de me retrouver face à lui mais je suis malgré tout très intéressée de découvrir tout ce qui entoure une histoire comme celle-là. Toujours cette dualité, je vis douloureusement cette agression, mais je ne peux pas non plus ignorer l'intérêt, pour moi, de ce que je vis. Comme si à l'instant où je le vis, j'enregistre des éléments d'information, non pas pour m'en vanter plus tard, mais pour moi, juste pour moi, parce que la vie me passionne tout simplement...

Nous sommes devant l'immeuble, mes jambes vacillent, nous montons l'escalier, arrivons devant la porte... Ils sonnent... personne... ils défoncent la porte... tout est là, exactement comme je l'ai décrit, le disque en morceaux, les tasses de thé, la chemise de nuit sale que j'ai dû enfiler... je me déplace, entourée des policiers. Comme cet appartement est banal, laid, étranger ! Derrière une étagère, là où je l'avais vu le cacher, on retrouve le pistolet avec lequel il m'a braqué... c'est un jouet, un simple jouet ! J'ai honte. Pour adoucir ma honte, ils me raconteront avoir eux aussi été braqués avec des armes factices et s'être laissés berner.
Nous repartons vers le commissariat et là j'apprends qu'ils l'ont retrouvé, qu'il est là dans les locaux.
Il est interrogé, il le sera toute la nuit et ce n'est qu'au matin qu'il reconnaitra l'agression. Pendant ce temps nous sommes rentrés à Annecy, les copains de mon beau-frère P., repartis à Lyon.
P. me raccompagne le lendemain.
Je vais devoir l'identifier, le reconnaître parmi plusieurs personnes placées face à moi contre un mur, le "tapissage". Juste avant de rentrer dans la salle on me prévient qu'il sera mêlé avec d'autres, soupçonnés d'un viol commis sur une mineure handicapée. J'imaginais que je serais protégée par une vitre sans tein, malheureusement non, il me verra. Je rentre, et là stupeur, je retrouve parmi les suspects un copain du foyer que j'ai croisé la veille au petit déjeuner. Pendant un instant je ne comprend pas pourquoi il est là, je crois que l'on me fait une blague de très mauvais goût, mais il est tout aussi stupéfait de me voir là. L'avant dernier est mon agresseur, je n'ai aucun mal à le reconnaître même s'il n'a plus grand chose de terrifiant, vite je sors de la salle. N°4, c'est lui !
Voilà, je signerais encore quelques papiers, le reste viendra plus tard.

Maintenant il va me falloir réapprendre à ne pas trembler dehors, réapprendre à faire confiance aux hommes.

vendredi 14 septembre 2007

(suite...)

Ils étaient là, cinq garçons, atterrés, muets, honteux d'avoir raillé ma prétendue folle nuit, et moi désolée d'être responsable de cet abattement. Je ne me sentais pas coupable, mais il me semblait que, tout de même, je ne valais pas plus que çela, et que, tôt ou tard, j'aurais eu de toute façon cette fin. Je trouvais excessif cette empathie, je n'en demandais pas tant, juste m'enfermer à la cave et ne plus bouger, jamais. Mais pour eux il fallait agir et vite, m'éloigner, me mettre à l'abri...
JP, abattu, appela sa sœur qui habitait la région, lui raconta succinctement ce qui nous arrivait. Elle exigea que l'on m'amène chez eux, quelques habits jetés dans un sac et nous étions en route. Je me souviens de ce voyage où régulièrement nous regardions si nous n'étions pas suivis, où malgré tout nous arrivions à parler, peut être même avons-nous rit.
Mon beau frère prit les choses en main, fermement, calmement. Pendant que F. ma belle-sœur, me conduisait chez un médecin pour constater les marques de l'agression, lui de son côté prenait contact avec un ancien copain de lycée, inspecteur à la brigade des mœurs à Lyon.
Le médecin fit très attention pour ne pas me brusquer, mais je ne risquais rien, je n'étais rien ! Tout cela me semblait démesuré. Sans doute exagérais-je ce que je venais de vivre, et l'imposture n'allait pas tarder à être découverte. Je me sentais, malgré moi, embarquée dans une histoire qui prenait des proportions bien supérieur à ce qu'elle aurait dû être.
Mon certificat détaillé dans la poche, nous sommes retournés dans leur maison où nous attendait l'ami de P. mon beau-frère, et un de ses collègues. Ils étaient venus de Lyon, lâchant tout... perdre leur temps juste pour m'entendre !...

Je les revois, assis en face de moi, écoutant attentivement ce que je racontais, me posant de temps en temps des questions, tentant de me persuader que je devais porter plainte. Mais j'avais juré à mon agresseur que s'il me laissait la vie sauve je ne porterais pas plainte, et pour rien au monde je n'aurais failli à cette promesse. J'avais juré, et s'il me restait encore une chose pouvant me rattacher au genre humain, c'était cela, respecter ma parole !
L'ami de P. me demanda d'appeler mon père, qu'il me dise si je pouvais ne pas respecter cet engagement. Au bout du fil, ma mère ! D'une voix éteinte je lui explique que voilà, cette nuit, j'ai été violée... elle n'a pas le temps de bavarder... elle a des invités qui vont arriver d'une minute à l'autre... elle me passe mon père !
Lui m'écoute, m'écoute vraiment et cela m'étonne. Il me dit qu'une promesse faite sous la menace n'a pas de valeur. Oui je peux, je dois porter plainte. Il m'embrasse, on raccroche.

Eh bien soit, s'il le faut, je porterais plainte.
Juste parce que cela me réjouit et qu'il est toujours intéressant d'avoir une voix discordante concernant les informations officielles approuvées par notre bon souverain, je suis allée ce matin m'abonner à Arrêt sur image. Et à l'instant, sur France Info, alors que j'apprenais la mort de "l'ex à Cécilia"* l'idole des médias, celle que le monnnnnnnnnde entier nous envie (dixit je ne sais plus quel canard** dont je n'ai aperçu que la couverture), Schneidermann qui était l'invité de l'émission a précisé que depuis hier soir il y avait déjà 3000 abonnés. Tant mieux et longue vie à son site.

Edit : Vinvin décortique minutieusement le pourquoi il ne s'abonnera pas (du moins pour l'instant) à @rrêt sur image. C'est intéressant. Je reste moi sur mon envie de donner cette chance à une équipe (et pas seulement Schneidermann) - Je me souviens du jour où mes parents, malgré un budget assez serré, avaient eu aussi envie de donner cette chance à une toute petite boîte qui démarrait - Harmonia Mundi - et cette boîte non seulement avait démarré, mais elle continue à éditer d'excellents disques sortant de l'ordinaire.
*Je sais bien que l'on ne dit pas "à" mais "de", mais là je trouve que cela sonne bien avec Mme BlingBling
** Merci Higgins, grâce à toi je sais maintenant que le canard en question est "Point de vue image du monde"

jeudi 13 septembre 2007

a quoi ça sert

Je sors de chez le dentiste - Zut une carie qui se cache sous une couronne = 484 euros Youpiiii ! Et si je dois attendre la taxe sur les produits gras pour pouvoir me faire rembourser correctement cette dent, je devrais au moins attendre jusqu'après les législatives.
Nous avons parlé un peu de la situation politique, du silence assourdissant de la gauche, des quotas d'hortefeu (oui le sais je devrais mettre une majuscule, mais là non... je ne peux pas), du mépris de notre grand président vis à vis de ce qui a fait que la France, un temps, était la patrie des droits de l'homme.
Avant, dans la salle d'attente, je feuilletais les journaux et je suis tombée sur ce petit article qui fera bien plaisir à Meerkat, Samantdi, Dieu des Chats et Dr CaSo..

A quoi sert le chat ?
"Tous les animaux parlent, excepté le perroquet qui parle", écrivait Jules Renard. Des langages animaliers, celui du chat demeure le plus mystérieux, le plus hiéroglyphique, dira-t-on volontiers, tant le chat et l'Egypte ont appris à faire bon ménage il y a quelques milliers d'années. Est-ce pour cela que l'on se noie si volontiers dans l'énigme de son regard . On dialogue avec son chien. On capte le sonar des dauphins. Le cheval répond à son cavalier. Mais le chat ? Il ne répond pas. Il ne se dresse pas. Il ne fait pas le beau, il est beau, cela lui suffit. En bref, il est aux abonnés absents. Inutile de lui laisser un message. Il s'en moque.
La tentation est donc grande de faire parler les chats, de se rattraper en somme de cette frustration ou de ce vertige éprouvés face à eux. Bien des poètes et des écrivains s'y sont risqués, les malheureux ! Citons pour le plaisir un livre, un seul, un chef-d'oeuvre, "Le Chat Murr", d'E.T.A. Hoffmann, puis fermons la parenthèse... et ouvrons-nous aux mystères du chat ! Il est l'animal domestique par excellence, c'est à dire le seul qui ait réussi à domestiquer l'homme et non le contraire, et d'un autre côté il incarne la vie sauvage à l'état pur. Ce qu'à si joliment souligné Alexandre Vialatte, disant de lui : " Dieu l'a fait dans Sa grand bonté pour que l'homme puisse caresser le tigre." Il est le symbole du confort, de la placidité obstinée, de la somnolence philosophique. Mais, plus vif que l'éclair, que la passion, que le caprice, il bondit soudain, il est là, il n'est plus là, il bascule dans une autre dimension spatio-temporelle, c'est un animal de science-fiction. Pour un écrivain, il sert de presse-papier, de correcteur ou de censeur. Aussi sec, il le laisse en plan, et bonsoir ! Il incarne précisément tout ce qu'un romancier ne pourra jamais capturer. En un mot, il est un professeur d'humilité. Mais arrêtons là ! On a compris que le chat, qui ne sert à rien, nous est pour cela même indispensable. - Frédéric Vitoux (4 janvier 2007)

Je sais ce n'est pas bien de piquer les journaux dans les salles d'attente, mais j'y retourne bientôt et je l'y remettrai.

mercredi 12 septembre 2007

29 janvier 1983

Quand au bout de neuf heures nous sommes enfin sortis de cet appartement, j'avais perdu ce qui fait la structure d'une vie. Je n'étais plus rien. "Dehors" était encore plus terrifiant que "Dedans".
Il avait décidé de me laisser un temps la vie sauve, de me permettre d'aller à mon nouveau travail. Il m'accompagnait et nous marchions l'un à côté de l'autre dans les rues encore vides. Le jour se levait à peine, il faisait froid sans doute, mais j'avais aussi perdu cette sensation là.
A un moment il m'a laissé seule sur le trottoir le temps d'aller chercher une sacoche qu'il avait laissé la veille dans une cave... je l'ai supplié de ne pas m'abandonner. Je l'ai attendu, statufiée... il est revenu avec sa sacoche et nous avons repris notre marche silencieuse.
Arrivés devant un bistrot il m'a proposé de boire un café. J'ai dit "oui". Nous sommes d'abord allés dans la boulangerie à côté, il a acheté des croissants puis nous sommes entrés dans le café. Il y avait la vie, une vie qui m'était follement étrangère, nous nous sommes assis. Je regardais le patron du café, et j'aurais voulu qu'il lise dans mes yeux "sauvez-moi", mais j'étais transparente. Boire le café sans goût, manger le croissant sans aucune perception dans la bouche ni sur la langue et l'avaler. Nous nous sommes levés, il a payé.
Nous sommes repartis sans un mot, jusque chez Mme M., celle qui venait tout juste de m'embaucher pour lui faire son ménage. Là, il a dit "Si tu parles je te tue, je tue JP. Je reviens te chercher dans deux heures". Il est reparti et j'ai sonné à la porte de Mme M.
Elle m'a ouvert et a dit "Oh mais Valérie vous êtes en avance" elle m'a donné les instructions pour le ménage. Parce que ce n'était que le deuxième jour que je faisais le ménage chez elle, elle est restée un peu avec moi. J'ai vidé la poubelle de la salle de bain, j'ai commencé à laver la baignoire... Elle m'a regardé et a dit "Valérie, vous êtes malade ? Vous avez l'air tellement fatiguée !" Je me suis relevée, je l'ai regardé et je lui ai raconté, j'étais si loin, si morte.
Elle a voulu appeler un taxi, je lui ai dit que j'avais promis d'attendre qu'il revienne me chercher. Elle a appelé un taxi, elle a attendu qu'il soit là, elle m'a mis dans le taxi, a donné mon adresse, a payé. Il était un peu plus que 8 h.
Nous habitions au foyer des jeunes travailleurs, il y avait une pénurie de logement. Il s'est arrêté, il m'a accompagné jusqu'à l'entrée, a attendu que l'on vienne ouvrir, que je rentre dans le foyer, il est reparti.
Je suis montée dans notre chambre, JP dormait. Je l'ai réveillé, je lui ai raconté et je suis allée prendre une douche, une douche brûlante, je voulais rester sous l'eau toujours, je voulais m'arracher la peau.
Ensuite JP m'a emmenée prendre le petit déjeuner, nous nous sommes assis à une table, je buvais mon café au lait. Des copains du foyer sont venus s'asseoir à notre table. A un moment il y en a un qui a dit "Ben dis donc toi tu as fait la fête, tu n'as pas dormi, tu as vu ta tête ?" Alors j'ai raconté de cette voix monocorde, ils se sont tous tus. Et j'ai senti à ce moment là que peut être je n'étais pas encore tout à fait morte. Ils étaient là, vraiment là et ils avaient décidé de prendre l'affaire en main.

lundi 10 septembre 2007

fenaison

Lorsque la charrette était pleine, on s'asseyait au sommet et nous partions vers la grange à foin. Le vent léger soulevait des brins de paille qui se fichaient dans nos cheveux et l'odeur chaude du foin nous enveloppait tout le long du trajet. Parfois nous devions nous coucher rapidement sous peine d'être fouettés par la branche un peu basse d'un arbre bordant le chemin. Là haut nous étions tout puissant dominant le monde.
Devant la grange nous sautions dans les bras de ces robustes paysans, et j'avais des frissons de plaisir, premiers émois de petite fille. On déposait les bottes de foin qui grimpaient sur les chaînes jusqu'au grenier où, plus tard, nous ferions des cabanes, disposant ces bottes en longs couloirs débouchant sur nos antres secrètes. La charrette vide, nous repartions cette fois assis sur le tracteur, brinqueballés dans tous les sens et les allers et retours ne s'arrêtaient que lorsque le champs était complètement nettoyé.
Venait alors la récompense! Nous avions droit au goûter... et quel goûter !
Nous n'entrions que rarement dans la partie habitée de la ferme, mais ces jours là, nous y étions invités et assez impressionnés en pénétrant dans la pièce sombre et fraîche. A peine assis à la grande table en bois sombre, on nous découpait d'énormes tranches de pain rectangulaire. Ce pain dont l'arôme nous narguait lorsqu'à peine sorti du four il refroidissait sur les marches de l'escalier. Posées à même la table, elles nous servaient d'assiette. Par dessus nous y déposions le saucisson de la ferme, le beurre, le pâté et nous dévorions à pleine bouche ce pain merveilleux à la mie tendre et la croute tellement croquante. Venait ensuite la tarte au quetsches noyée dans un flanc aux œufs et dont l'abaisse était elle aussi en pâte à pain. Nous buvions le jus des pommes du verger, c'était le meilleur repas du monde.
On rentrait repus, heureux, bronzés, et tellement fatigués que l'on se débarbouillait rapidement et on filait au lit.

dimanche 9 septembre 2007

moksa

Cherchant une maison de campagne, mes parents en avaient trouvé une à louer dans un hameau au fin fond du Sundgau en Alsace, au Birkenhof ! Dès lors, nous y avons passé tous nos week-end et une grande partie de nos vacances jusqu'à ce qu'ils achètent une vieille ferme du côté de Kaysersberg en 1973.
Ce Birkenhof était un vrai paradis. Trois fermes le constituaient, toutes habitées par les membres d'une seule famille de religion mennonite. Nous étions les seuls enfants, et nous étions les rois.
Souvent mes parents nous y laissaient seuls, les cinq enfants, toute la journée. Ils partaient tôt pour arriver vers huit heures à Mulhouse et rentraient vers 19 heures une fois les consultations terminées. Nous passions toute la journée avec les fermiers du hameau, participant à toutes leurs activités. Nous les filles, nous occupions des animaux de la ferme, nourrir les cochons, les veaux, les poules, cueillir les légumes du jardin, chercher les vaches le soir à leur pâturage pour les amener à la traite. Mes frères s'occupaient des travaux des champs, labourer, semer, faner, parfois aussi ils avaient le droit d'assister à un vêlage.
Au moment des foins tous se retrouvaient pour ramasser les grosses bottes, nous les filles étions sur la charrette et les entassions au fur et à mesure que les garçons nous les jetaient. Un jour, alors que je faisais consciencieusement mon boulot de fille, attrapant à pleines mains une botte de foin, je ressenti une violente piqure, un gros frelon, à peine estourbi par mon écrasement involontaire repris son envol et disparu dans l'azur. Prestement je descendis de la charrette et courue vers la maison, suivie de mon frère qui lui aussi avait vu le monstre s'envoler. Nous savions que l'on pouvait atténuer l'effet de la piqure en faisant un moksa, prendre une cigarette allumée et approcher jusqu'à ce que la chaleur soit difficilement supportable le bout incandescent à l'endroit troué par la bestiole. Ma journée de labeur était stoppée nette, et je me mis à gonfler, gonfler, gonfler. Cela faisait beaucoup rire mes frères et soeur, tant et si bien que l'on déçida de faire une blague à mes parents. Entendant le moteur de leur voiture, ils se mirent devant moi, me cachant aux yeux de mes parents. A leur entrée, ils s'écartèrent en criant "surprise" et j'étais là, tel le bonhomme michelin, les bras écartés, souriante et un peu sonnée.
A la tête qu'ils firent, nous comprîmes que décidément nos blagues ne les faisaient pas toujours rire !

samedi 8 septembre 2007

...

Hiver 1993
Maintenant je suis complètement rodée, je partage ma vie entre la maison et l'hôpital. Le matin je fais tourner une machine, repasse le linge sec de la veille et vers 7 heures réveille C. Petit déjeuner tranquille, on s'habille. C. est très coquette, elle a de longs cheveux blonds, très épais que je tresse tous les matins, une lourde tresse qui lui tombe jusqu'au milieu du dos. J'ai tant de plaisir à retrouver ces gestes d'une maman comme les autres. Un peu avant 8 heures, en nous racontant nos histoires de filles, nous partons pour l'école. Elle saute d'un pavé à l'autre, chantonne, se retourne et me regarde avec tendresse, elle rayonne. Je la laisse en bas de l'escalier en pierre... elle s'envole pour la journée.
Vite je rentre, fourre dans un sac les habits propres et repassés de mon petit bonhomme. 20 minutes de route et j'arrive juste pour la toilette de G. tranquillement installé dans un transat au milieu des infirmières dans leur salle de repos. Il est chez lui, cela fait maintenant plus de deux ans qu'il est suivi et hospitalisé dans cet hôpital qui nous a accueillis un soir cataclysmique. Il a un aspergelus et le traitement pour l'éradiquer est lourd et nécessite l'hospitalisation. Comme ses veines ont été particulièrement sollicitées depuis sa naissance, et après des ruses de sioux pour en trouver des bien cachées sur le crâne et sur les pieds, en dernier recours un port-a-cath lui a été posé quelques semaines avant, à Paris. Il n'y a plus l'angoisse de la veine qui pète, de la veine qui se bouche, de la veine qui glisse. Maintenant G. regarde avec intérêt les infirmières nettoyer ce petit coin de peau, et dès que la perfusion est en route il s'accroche au triangle au dessus du lit et fait de "l'hélicoptère".
Je me balade dans le service, G. dans la poussette dès que sa dose est passée. Parfois nous sortons dans le parc juste derrière, et le bonheur est total lorsqu'un hélicoptère vient se poser sur la grosse croix rouge. A midi je lui donne son repas et nous regardons un peu la télévision, je lui lis des histoires et profite de sa sieste pour faire les courses au supermarché à côté. A 16 heures je file chercher C. à l'école et nous reprenons la voiture jusqu'à l'hôpital, où, en compagnie de son petit frère, elle fait ses devoirs du lendemain. Parfois, comble de bonheur, je lui commande un repas. Et tous les deux, assis sur le lit, regardant la télévision, ils dégustent les bons petits plats de l'hôpital.
Elle embrasse son frère, nous repartons pour 20 minutes de route retrouver JP rentré du bureau. Lorsqu'elle dort, je reviens faire un tour dans ma résidence secondaire. J'aime le calme du service, et je vais boire un café avec les infirmières de nuit. C'est un petit hôpital, il y a rarement des cas graves, en général l'hôpital cantonal de Genève les prend en charge. Une fois la dernière perf terminée, je rentre à la maison, le trajet est rapide, il n'y a plus personne sur la route.

Un soir d'hiver, G. commençait à somnoler, le traitement passait lentement et je déambulais dans le couloir plongé dans la pénombre, un gobelet de café à la main. Le service avait débuté sa nuit, la nursery n'était plus qu'éclairée par les veilleuses, les petits opérés du jour avaient trouvé le sommeil. Rompant la quiétude de ce début de nuit, la porte de l'entrée fut poussée vigoureusement par des ambulancier tenant un brancard sur lequel était posée une couveuse, suivait une jeune femme anéantie. Rapidement pris en charge, le bébé disparut dans la salle de soin, et la maman muette et le regard perdu, abandonnée dans le couloir.
Naturellement j'allais l'accueillir, après tout j'étais un peu chez moi et je voulais la rassurer. Son bébé avait de la fièvre, pas énormément certes, un petit 39°, mais le médecin préférait qu'il soit vu par le pédiatre de garde. A ce moment là nous vîmes arriver d'un pas pressé le chef de service, qui passa sans nous regarder et s'engouffra dans la salle de soin. Ce bébé était le premier enfant de cette maman et je la rassurai en lui disant que 39° ce n'était pas une fièvre élevée, que le médecin qui venait de passer était très compétent, que bientôt elle rentrerait avec son petit dans les bras. La perfusion de G. étant finie, je la quittais pour aller lui faire un calin et attendre à son chevet qu'il s'endorme.
Elle était assise presque en face de la porte de notre chambre, et j'entendis le Dr M. lui poser une question que l'on me poserait l'année suivante.

"Vous avez de la famille près de vous ?"

Ce petit bébé, avec son petit 39°, venait pour la deuxième fois de faire un arrêt cardiaque. Les pompiers étaient en route pour le chercher et l'emmener d'urgence à Genève.

Le lendemain le Dr M. m'expliquera que ce bébé, atteint d'un purpura fulminans, avait fait un troisième arrêt cardiaque fatal dans l'ambulance des pompiers.

Et je me suis vue, minable, allant rassurer cette maman qui s'affolait pour pas grand chose, moi qui avait vécu tellement plus grave. Moi qui avait toujours mon petit garçon, elle qui venait de perdre le sien. Plus jamais je ne regarderai avec cette légère condescendance, une maman angoissée par la maladie de son enfant.

vendredi 7 septembre 2007

Cela fait plusieurs jours que je discute avec moi-même au sujet de ce blog. Je raconte par bribes une partie de mon histoire mais il y manque le ton, et je crains que cela ne puisse ressembler qu'à une longue complainte. Lorsque je raconte de vive voix, je joue un peu comme au théâtre, je change de voix, je mime, je suis très expressive, extrêmement extravertie. Je suis également tenue de respecter la confidentialité de mes enfants, mon mari, je penses, se fiche totalement d'être reconnu (il est même entrain de se faire un avatar avec son vrai visage pour son personnage de second-life). Mais mes enfants ne tiennent absolument pas à être reconnus. Je jongle donc pour, tout en racontant au plus juste notre histoire, garder un coin de mystère sur leur vie. C'est un peu frustrant parfois, mais cela me force aussi à essayer non seulement de colorer mes phrases, mais aussi à ruser pour, malgré tout, parler de mes enfants. Lorsque je raconte un moment délicat de ma vie, je me sens assez gênée pour répondre aux marques d'amitié glissées dans vos commentaires. Pourquoi donc est ce que je raconte ma vie ? C'est justement l'objet de mes discussions "internes", et la conclusion provisoire est que tout simplement j'aime raconter !

le bout du bout

mercredi 23 novembre 1994
J'ai enfin pris rendez-vous chez le dermato. J'ai plein de petits boutons, c'est moche et comme ma vie va à vau-l'eau depuis quelques temps, qu'au moins je ne me noie pas trop moche.
Il m'examine un moment, me demande si je suis sous cortisone, m'interroge sur ma santé... nous devisons légèrement. Après tout ce ne sont que quelques petits boutons, pas franchement jolis mais sans gravité c'est sûr. Il rédige l'ordonnance, je règle la consultation et tout en me levant je lui dis que sans doute ces boutons sont dûs en grande partie à l'angoisse que j'éprouve face à JP qui ne pète pas la forme, loin s'en faut.

- "Ah bon ? que lui arrive-t-il  ?"
Je lui raconte brièvement nos vacances où un jour, sortant de la mer, il était tout bleu, ma peur qu'il fasse une crise cardiaque et qu'en fin de compte ce n'était qu'un syndrome de raynaud.
- "Mais il a vu un médecin ?"
Oui oui il est suivi depuis septembre par un angiologue, il a fait des examens, on cherche.
- "Bon tant qu'il n'a pas de problème pulmonaire !"
Ah mais si justement ça a commencé par un pneumothorax en avril et depuis il ne s'en est pas remis. Il a perdu 15 kilos mais le médecin me dit que c'est typique des hommes, ils sont vite déprimés, se laissent aller... c'est rien.
- "Ah oui... bon tant qu'il n'a pas de problème d'œsophage !"
Ah mais si justement il a du mal à avaler, à Grenoble ils parlent de sphincters de l'œsophage qui ne fonctionnent plus bien.

Silence... il me regarde.. nous nous sommes rassis
-"Et ses mains ?"
Il souffre des articulations, ses doigts sont gonflés...

Silence...

Lentement il parle... me dit son inquiétude.

- "Appelez-le !" - il tourne le téléphone, me l'approche, décroche le combiné...
- "Appelez-le et dites lui que je veux le voir, maintenant"

Il est presque 19h, j'appelle JP au bureau, il doit venir vite, le Dr. V. a peut-être enfin trouvé de quoi il souffrait.

Vingt minutes après JP est là, épuisé, maigre à faire peur. Il ne faut pas longtemps au médecin pour décider d'une hospitalisation en urgence à Lyon. Il appelle le service dermato d'Édouard Herriot.
Demain aux aurores une ambulance viendra le chercher.

Le Dr V. le regarde avec douceur - "Vous êtes au bout du rouleau non ? "

samedi 1 septembre 2007

Eglise St Georges d'Oléron
Lundi elle s'envole vers la Hongrie. Le déménagement est fait, elle débarque de Lyon tout à l'heure, et nous allons passer tranquillement ce dernier week-end en famille. Pas de blog donc !